Lorsque le gradé missionné pour venir le prévenir de sa nouvelle affectation arriva, le déchaîné était encore en train d'étudier les marques apparues sur lui, moult parchemins ouverts de part et d'autre autour de lui. Il se présenta à la porte vêtu d'un simple pantalon de toile, n'ayant pas pris le temps de se rhabiller puisqu'il finirait de toute façon par en revenir à l'analyse de ses mystérieux tatouages. L'homme, d'abord décontenancé, balbutia quelques mots avant de lui remettre en main propre une pile de parchemins. Génial, encore de la paperasse, je vais finir par me noyer dessous dans ma petite chambre.
— Étudiez bien les deux autres duplicatas de rapports avant de vous y rendre. Le parchemin à la reliure bleue comporte quant à lui votre ordre de mission formel. — Je n'y manquerai pas.
Le messager parti, Sabaru referma la porte de son domicile soigneusement avant d'aller ranger les précieux documents auprès des nombreux autres qui recouvraient son bureau. Cet ordre de mission ne pouvait visiblement pas mieux tomber.
***
✧ Rendez-vous au port un jeudi et retrouvez votre équipe.
Les rapports faisaient mention d'étranges agissements le jeudi, en particulier ; alors ce fut le jour qu'il choisit pour se rendre au port Naragasa. Ses deux coéquipiers, Yasei Reikan et Aditya, avaient été prévenus quelques jours plus tôt, par le biais de brèves rédigées de sa propre main.
L'ordre de mission stipulait clairement son rang ; B. Pour un genin, il était somme toute assez rare de participer à des missions de ce rang ; mais c'était déjà la seconde pour lui. Si la précédente s'était bien déroulée, c'était aussi parce qu'un gradé faisait partie du groupe, sans compter Shaka qui était encore à l'époque son coéquipier — et qui savait, faut-il le rappeler, très bien se battre. Se voir confier une telle mission, avec deux autres aspirants pour coéquipiers, aurait glacé le sang de plus d'un shinobi en début de carrière. Cela dit, Sabaru connaissait Aditya, et s'était même déjà battu contre et avec Reikan. Connaissant leurs forces et leurs compétences, il n'eut pas même l'ombre d'un doute quant à la réussite de leur opération.
Confiant, il s'était donc rendu aux aurores aux abords du port, en prenant soin de ne parler de la mission à aucun des shinobis, Kenpei ou pas, qui montaient la garde sur les docks. La traque avait d'ores et déjà commencé ; et les rapports parlaient de Kirijins qui profitaient du trafic pour s'enrichir eux aussi. Personne ne serait dans la confidence, sauf ses coéquipiers du jour.
Pour être sûr que les deux autres aspirants ne le manquent pas, le maître des liens choisit de prendre de la hauteur pour se poster sur le toit de l'un des magasins bordant une longue avenue menant aux quais. Sa longue cape retombait jusqu'à ses chevilles, noire et sans fioritures, mais la longue faux noire qui brillait sous les lueurs naissances du soleil informait très clairement quiconque l'avait déjà vue de l'identité de son porteur. Il avait un peu changé, notamment vis à vis de ses tatouages ; il fallait donc qu'il s'assure d'être reconnu.
Il n'y avait pas de temps à perdre. La mission qui conclurait cette longue enquête visant à assainir les eaux de Naragasa avait débuté.
En même temps qu'elle découvrait les avantages que procurait un village, la tigresse blanche prit également connaissance avec la facette plus sombre de la pièce. La Brume offrait aux familles les plus honnêtes un confort sans pareil, mais elle laissait porte ouverte aux plus convoiteux. En effet, les rapaces de la rentabilité prohibée rôdaient toujours dans le ciel d'accalmie de Kiri, et de tels charognes ne pouvaient se contenter de déambuler sans ne jamais descendre sur la terre ferme. Il leur fallait tirer profit de la place forte du Mizu no Kuni, dont la zone portuaire était totalement tournée vers le Yuukan. La diversité des possibilités et des aubaines marchandes rendait la Brume plus qu'intéressante, surtout pour... des adeptes du trafic de stupéfiants. Il s'agissait là du principal sujet de la tache pour laquelle Reikan et ses compétences avaient été sollicitées, par le biais de Nō Sabaru et en compagnie d'Aditya. L'ordre de mission énonçait le vice des bénéfices qui rongeait quelques malfrats du port Naragasa, mettant en avant les agissements de groupes de Yakuzas et d'une organisation criminelle, appelée Tatsuzô. Le micmac était si poussé que même certaines pousses du village avaient été corrompues. Décidément, même la plus pacifiste des politiques peut avoir en son sein des gangrénés...
***
Reikan avait attendu le premier jeudi suivant la réception de sa missive. À l'heure où les oiseaux chantaient encore, la métamorphe s'extirpa de son logis en empruntant la voie aérienne. Sa silhouette raffinée et élancée traversa les premiers rayons de soleil, se faufilant sur les charpentes. Il n'y avait pas de place pour s'accorder une pause dans une échoppe en cette matinée, obligeant la féline à se rendre jusqu'à la plateforme le plus vite possible. En cours de route, elle ne manqua pas de remarquer la présence de différents points de contrôle et de patrouille de la part d'agents de la Kenpei, qui englobaient en grande partie le marché de pêche. La tigresse termina sa course sur l'un des toits, prêtant attention à une silhouette masculine munie d'une énorme faux, qu'elle reconnut sans détour. Elle se redressa d'une traite, avant de marcher sur les tuiles pour s'en rapprocher et s'assurer qu'il s'agissait bel et bien là de son ami. C'est bien Sabaru, mais... des tatouages? La changeforme salua ce dernier, haussant par la même occasion un de ses sourcils pour témoigner de sa surprise.
« Tu m'as l'air bien matinal, Sabaru. Se pourrait-il que tu sois impatient d'entamer cette mission? »
Une fois arrivée aux côtés de son ami au bord du toit, la jolie brune balaya le sourire taquin qui s'était emparé de son faciès, afin de le remplacer par un sérieux exemplaire. Après tout, la mission en elle-même paraissait plutôt importante, puisqu'elle constituait l'aboutissement de diverses enquêtes préalables. Il leur fallait mettre un terme à ces manigances illégales, et ce en vue d'éradiquer sans doute le plus important des trafics de drogues qui infectait le village. La longue cape capuchonnée de la féline, qui allait de pair avec la veste du déchaîné, voltigea en arrière à cause du vent marin. Sous cette couche textile supplémentaire, étaient dissimulés sa sacoche ninja et son accoutrement missionnaire. Sans attendre, Reikan tourna la tête sur le côté pour déposer son regard prédateur sur la chevelure singulière d'Aditya, qui se baladait dans l'artère mercantile principale menant au quai portuaire.
Printemps de l'an 203, Village de Kiri, Temple Seidou, début d'après-midi.
Les sourcils froncés par une surprise mêlée de curiosité, Aditya prit connaissance des divers rapports et ordres de mission qu’il venait de recevoir de la part d’un messager, qu’il congédia avec un remerciement bienvenu. Si le semblant d’enquête qu’il avait mené avec Sabaru l’avait plus ou moins initié à la discrétion et à une nouvelle forme de réflexion, le rang que la missive arborait le fit hésiter l’espace d’un instant. Pour une première affectation de ce genre, il ne pouvait rêver meilleurs compagnons ; là où la finesse d’esprit du déchainé rivalisait avec la prudence de la métamorphe, son sang-froid ne pouvait que compléter un tel trio. Un détail attira cependant son attention : leur réunion tiendrait lieu en milieu de semaine, un jeudi. Il avait donc quelques jours supplémentaires pour étudier avec ferveur les rapports et prendre connaissance des détails même les plus futiles qu’ils contenaient – après tout, même l’information la plus singulière pouvait donner le change dans des situations pareilles, où la discrétion était une règle infranchissable. Il remonta pas à pas les escaliers menant à son logis, maigre aménagement dans un renfort du toit du temple pour s’affranchir de tels devoirs.
[…]
Printemps de l'an 203, Village de Kiri, Port Nagarasa, aurore.
L’esprit embrumé par des interrogations essentielles au bon déroulé de la mission, Aditya rejoignis le port à pas de loup. Son regard vagabondait sur les divers édifices et visages qui tendaient à rendre vivant un tel lieu, avant qu’il ne s’échoue sur l’un des toits, où deux silhouettes trônaient en maître. Il avait bien fait de ne pas choisir la voie des airs contrairement à ses comparses ; il pouvait ainsi observer les actions au sol sans que leur groupuscule n’attire une attention non désirée sur leurs faits et gestes. Pour l’instant… il semblerait qu’aucune action douteuse ne soit entreprise par la foule, ou tout du moins en surface. Il prit soin d’éviter les regards curieux de certains des pécheurs avant de s’enfoncer dans des retranchements plus discrets. D’un bond puissant, ses pas le mènent sur ce fameux toit, aidés par un afflux discret de chakra qui recouvrit ses sandales, l’espace d’un bref instant. Il salua le duo d’ores et déjà installé d’un signe de tête formel. S’il avait tâché de reconnaître Sabaru à la lumière que sa faux reluisait sur l’horizon, son apparence, elle, était tout à fait différente de la dernière fois qu’il l’eut croisé, lors d’un enseignement mutuel. Des tatouages rougeoyants parcouraient son corps, tandis que sa chevelure, bien plus longue, insufflait un doute dans l’esprit du blond. Il retint ce questionnement à la lisière de ses lèvres, déclinant un regard vers les docs qui se présentaient à lui tel un tableau aqueux, depuis une telle hauteur.
« Reikan, Sabaru. J'imagine que maintenant que nous sommes tous trois réunis, nous pouvons nous mettre en route. Je doute que l'ombre de l'aurore ne couvre nos traces encore bien longtemps. », glissa-t-il avec un sourire avenant et que, d'un geste désormais entretenu par l'habitude, il ne coche un des objectifs principaux de cette mission sur son carnet de note.
OBJECTIFS:
___☑ RENDEZ-VOUS AU PORT UN JEUDI ET RETROUVEZ VOTRE EQUIPE : le trio s'est retrouvé comme convenu au port Nagarasa, le premier jeudi suivant la réception de l'ordre de mission.
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embrace the legacy lying in your blood, sunchild
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Dernière édition par Aditya le Ven 15 Mar 2019 - 7:29, édité 1 fois
Reikan fut la première à le trouver et à le rejoindre sur son perchoir, vêtue d'une cape elle aussi. Cette similitude dans leurs accoutrements — qui était bien la seule — lui tira une expression amusée, qu'il conserva face au regard interrogateur de son amie et collègue. Sans doute était-elle surprise par les marques du déchaîné, ainsi que sa chevelure qu'il avait décidé de laisser pousser par endroits. Malheureusement pour elle, elle n'aurait pas de réponses ce jour-la ; ils n'avaient pas le temps de papoter, avec une telle mission sur les bras.
— Il vaut mieux prendre les bonnes habitudes dès maintenant. Avec le complexe et la vie de shinobi, se lever tôt et se préparer consciencieusement deviennent des nécessités.
À peine eut-il terminé sa phrase qu'Aditya surgissait sur le toit, à leurs côtés. Coupant court aux banalités, l'arrivée du moine du temple Seidou signa officiellement le début des opérations. Sa ponctualité et celle de la féline déchargèrent un certain poids des épaules de Sabaru, qui se sentait enfin entouré de personnes compétentes. Déterminé à entrer dans le vif du sujet, l'ascète suggéra le début des opérations, après un regard tout aussi circonspect que celui de Reikan à l'adresse du maître des liens.
Comme à son habitude, il endosserait le rôle de la tour de commandes de la mission. S'il ne doutait pas des compétences d'Aditya et de Reikan, il était assurément plus habitué aux enquêtes ; et de toute façon, si l'un d'entre eux désirait prendre le flambeau, il ne se ferait pas prier.
— Je propose de débuter par un petit amuse-gueule ; une patrouille du port. Il y a divers points de contrôle à vérifier, mais nous en couvrirons un chacun. Si cela peut sembler être une perte de temps, puisqu'on nous a désigné un entrepôt bien précis, je peux vous assurer que nous serons bien contents d'avoir débuté par un travail de surface quand nous devrons enchaîner après avoir récolté nos premières preuves.
Pour illustrer ses propos, le déchaîné déroula une carte tirée de sa sacoche de shinobi, bien plus propre que le calepin hasardeux qu'il avait utilisé lors de l'enquête qui l'avait menée à rencontrer Aditya. Se plaçant au centre du groupe pour qu'ils puissent avoir une vue sur le document qui reproduisait Kiri et ses alentours, il reprit son explication, carte à l'appui.
— Je m'occuperai du quai désigné comme étant interdit d'accès le jeudi, à l'Ouest, puisque j'ai ma petite idée concernant le fameux bateau suspect. Aditya, j'aimerais que tu étudies les patrouilles autour de l'entrepôt sans t'approcher, afin de nous guider lorsque viendra le temps de l'inspection ; surtout, n'hésites pas à identifier les maillons faibles que nous pourrions évincer pour prendre leurs apparences, que ce soit parmi la gardes ou les gens qui entrent et sortent du bâtiment régulièrement. Et quant à toi, Reikan, j'aurais besoin de ton agilité et de ta discrétion pour écouter les gardes qui quittent la garnison du port, afin d'identifier les éventuelles taupes et d'avoir une idée de la quantité de corrompus dans leurs rangs.
Avec chaque instruction, il désignait l'endroit précis de la carte qu'il avait déjà annotée, puis indiquait à ses coéquipiers la direction à suivre pour s'y rendre. Ce plan séparait l'équipe en deux groupe, puisque la garnison se situait au centre du port, tandis que le bateau et l'entrepôt se trouvaient à l'Ouest, proches pour des raisons évidentes de commodité. C'est d'ailleurs pour cela qu'il avait envoyé Reikan en solo ; elle était probablement la plus discrète du groupe, et l'absence de fardeau lui permettrait de tirer pleinement avantage de son talent.
— Vous vous en doutez sûrement, mais l'usage de la technique de métamorphose sera très fortement encouragé, si pas obligatoire. Après l'observation, retrouvons-nous ici, dans la ruelle faisant face à l'entrepôt. N'oubliez pas que bien que nous soyons à Kiri et que nous ne risquons pas de nous faire submerger d'ennemis, nous devons rester discrets pour ne pas donner l'alerte dans leurs rangs, et causer la destruction des preuves ou la fuite de nos cibles. Considérons que nous sommes en terrain hostile à partir de maintenant.
✧ Fouillez discrètement le port, et surtout l'entrepôt désigné. ✧ Trouvez qui est le capitaine faisant la liaison entre les yakuzas de Kiri et Tatsuzô de Mizu no Kuni (le capitaine Daiki et son navire "Itsuzai")
Le début de l'investigation était donné. Après avoir enroulé sa carte pour la ranger, Sabaru adressa un signe de tête à Reikan, ainsi qu'un sourire amical d'encouragement. Immédiatement après, il bondit vers l'Ouest, en faisant signe de la main à Aditya de le suivre. En plein vol, il rangea sa longue faux sous sa cape, afin de ne pas attirer l'attention plus que de raison, et s'attela au repérage d'un éventuel badaud dont il pourrait usurper l'identité une fois arrivé sur place.
Résumé rapide:
On commence par de l'observation en surface, sans infiltration ni filature dangereuse, aux trois points suivants : Sabaru — Le bateau suspect et son quai aux très gros poissons. Aditya — L'entrepôt désigné, afin d'identifier les rondes et les cibles à usurper pour obtenir leurs privilèges lors de l'infiltration ultérieure. Reikan — La garnison du Kenpei à mettre sur écoute, afin de déterminer le degré de corruption de la force de police ainsi que les éventuelles têtes à éviter.
Le rendez-vous est fixé dans la ruelle faisant face à l'entrepôt, où la suite du plan sera échafaudée, avec l'éventuelle aide des informations récupérées, ainsi que celles du duplicata du rapport de Shitekka et d'Akane.
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能ある鷹は爪を隠す · Nō aru taka wa tsume wo kakusu « Le faucon avisé sait cacher ses serres. »
Merci à Yume pour l'avatar
Dernière édition par Nō Sabaru le Mar 14 Mai 2019 - 18:36, édité 3 fois
Le trio de missionnaires était d'ores et déjà formé sur les toits portuaires, alors que le crépuscule venait de tirer sa révérence pour laisser place à l'astre solaire. Les premières lueurs du jour saluèrent les infrastructures du port Naragasa, tandis que les habitants commençaient à déambuler dans les ruelles pour se soumettre à leur quotidien. En cet instant précis, la changeforme prit soin d'accueillir Aditya sur la charpente, d'un simple geste de sa dextre dans le vide et d'un bref sourire. Après l'avoir salué, sa paluche raffinée retourna sous l'épais vêtement qui couvrait ses épaules. Si la houle toute proche obstruait l'ouïe des passants en contrebas, Reikan resta néanmoins sur ses gardes pendant que le déchaîné procédait aux explications.
Si sur le coup, Sabaru prenait les commandes de cette mission, la tigresse blanche se contenta d'écouter ses directives, qui étaient d'ailleurs plutôt bien tournées. Satisfaite d'avoir laissé les rennes entre les mains de l'ascète, elle focalisa son attention sur la carte, décryptant l'acheminement des différentes artères menant à son objectif. Identifier les éventuelles taupes, un jeu d'enfant. Du moins, pour moi. Reikan se redressa sur ses jambes, avant de remonter sa sénestre à sa nuque. D'un revers de main, elle empoigna sa capuche pour la refourguer sur sa tête. Après avoir dissimulé sa chevelure et le haut de son visage, un sourire de sa part fut adressé à ses coéquipiers.
« Comptez sur moi pour la garnison. Bonne chance pour le reste. »
Ni une, ni deux, la féline s'élança vers une ruelle tout en restant proche du mur, pour ne pas attirer les regards. Elle s'éclipsa dans la pénombre de la façade, avant de se frayer un chemin entre les marchandises. Sans se retourner, Reikan traversa diverses veines mercantiles du secteur portuaire, pour mieux se rapprocher de la bâtisse de la garnison. Celle-ci était située au carrefour des quais principaux, qui fut rapidement foulé par les discrets pas de la jeune femme. Toujours vêtue de sa cape, elle prit soin de ne pas se faire remarquer avant de s'éclipser dans la pénombre d'une devanture.
Alors que son ombre se profilait au travers des multiples caissons de produits, Reikan arbora une tout autre forme. Le noren marchand fut balayé par l'apparition d'un chat noir et blanc, qui s'empressa de parcourir les planches de bois du quai pour parvenir à ses fins. Si le ponton menant à la garnison était jonché de pêcheurs et de marchands en phase de pourparlers, il était aussi infesté de personnes qui, en temps normal, n'y auraient jamais mis les pieds. Les effluves desdites épices mentionnées dans l'ordre de mission attirèrent l'attention de la maîtresse de la métamorphose, qui s'approcha de deux gardes postés au bord de l'eau. S'ils exhibaient avec fierté l'insigne de Kiri la Grande sur leurs bandeaux, leurs visage eux, ne pouvaient témoigner que d'une profonde malice. Grâce à la discrétion que lui procurait son henge en chat, la kunoichi s'infiltra dans l'entrée de la garnison jusqu'à se poser sur un monticule de caissons, à proximité du duo. Et si les traits de son minois félin témoignaient d’un air aussi inoffensif que celui d'un animal dépourvu de paroles, son ouïe, elle, n'était pas tout innocente. Ainsi, elle s'immisça au milieu du flot de paroles échangées entre les gardiens, en vue de préparer le terrain.
« On d'vrait faire vite pour remballer ces fichus rouleaux. Tatsuzô n'avait pas l'air de bonne humeur, ce matin... et j'pense qu'il le sera encore moins s'il apprend qu'il y a un risque de retard de livraison. — T'as raison, grouillons-nous de retourner au laboratoire. On doit être prêts pour ce soir. — Va chercher les autres, tu veux? »
L'un des deux gardes releva son séant des caisses en bois pour s'étirer, avant de jeter un regard suspicieux au chat, qui léchait le dos d’une de ses pattes. L’homme extériorisa un rictus repoussant vis-à-vis de l’animal d’apparence docile, comme s’il se retenait de pester en son for intérieur. Ces bêtes, alors… noir ou blanc, faut choisir. Sans détour, il reprit sa route sur le quai pour retourner à ses affaires illicites, pendant que son acolyte s'était intégré à une discussion entre trois marchands d’épices fines. La banalité n’était pas de mise en ce lieu, et surtout pas dans une conversation aussi douteuse. Ces poignées de mains n’étaient pas celles de bons vieux amis se retrouvant avant d’entamer une dure journée labeur, mais bien celles de bons vicieux préparant une magouille. Ainsi, en déambulant sur le ponton commercial, Reikan prit son temps pour identifier chacun des véreux, qu’il soit garde, civil, ou même... membre de la Kenpei.
Tous ceux qui osaient s'approcher ou daigner faire signe aux yakuzas reclus dans les alentours de la garnison étaient désormais fichés par la féline. Si ces criminels tatoués se faisaient discretsi, ils n’en restaient pas moins perceptibles aux yeux prédateurs de Reikan, qui ne perdit pas une miette de la nuée de visages avariés qu’elle avait à mémoriser pour la suite des opérations. La tigresse prit ses précautions en contournant les membres de la Kenpei qui patrouillaient dans le port Naragasa, tout en les gardant à l’œil en s'éloignant. Leur présence habituelle dans le port venait de lui mettre la puce à l'oreille de nôtre chère Reikan. S'ils feraient correctement leur travail, alors nous n'aurions pas à nous inquiéter d'un tel traf-... Et elle avait eu raison, lorsqu'elle aperçut ces derniers s'enfouir dans la garnison, suivis de près par deux yakuzas à l'allure déterminée. La Kenpei n'a pas échappé à la gangrène, à ce que je vois. Dès lors qu'elle eut remplie sa mission de reconnaissance et d'identification, la métamorphe s'éloigna des petits commerces et du port de pêche, en s'engouffrant dans une ruelle sombre, qui contrastait avec la clarté du soleil levant.
Le chat, porté disparu, laissa place à une silhouette féminine encapuchonnée, qui s'extirpa aussi agilement que discrètement vers les charpentes, pour rejoindre au plus vite le lieu de rendez-vous fixé par Sabaru. Si ces trafiquants s'en tiennent à leurs propos, c'est qu'une nouvelle cargaison est prête à prendre le large, dès ce soir. Espérons qu'on les en empêche avant qu'il ne soit trop tard.
Aditya acquiesça d’un signe de tête après que Sabaru lui ait confié son rôle de repérage, celui-ci pleinement concentré sur l’entrepôt visé par l’intitulé. Quant à ses comparses, la féline s’occuperait de déterminer la présence de renégats parmi la garnison de la Kenpei, et le déchainé, lui, partirait en quête d’informations et de mouvements suspects sur le quai. Ainsi, ils pourraient couvrir une plus grande distance en mettant les points forts de chacun en avant. Il adressa un regard entendu à Reikan alors qu’elle prenait congé de leur compagnie pour s’atteler à ses devoirs avant de ne glisser quelques mots du même acabit à son compère.
« Je vais m’y mettre aussi. Une fois les repérages terminés, rejoignons-nous ici. », termina-t-il sur un ton confiant.
D’un bond calculé, ses pieds retrouvèrent de nouveau la sureté de la terre près celle des tuiles, tandis qu’il se mit en chemin en direction de ce fameux entrepôt. Son regard vagabonda aux alentours pour tenter de repérer quelques coups d’œil suspects quant à sa personne – en vain ; la foule semblait bien plus préoccupée par ses activités matinales que par sa présence. Prudent, il se dissimula sous le renfort d’un toit qui délaissait une ombre épaisse sur son corps et une partie du flanc du bâtiment, profitant de ce moment d’accalmie, bien que bref, pour revêtir une apparence tout à fait différente ; celle d’un matelot dont il avait distingué la posture à son arrivée. A défaut d’être un maître dans les techniques de dissimulation – ce qu’il comptait expressément rectifier dans un futur proche – un bon vieux henge saurait faire l’affaire. La seule chose dont il devait s’inquiéter à ce propos, ce fut de ne pas être vu par la personne dont il avait revêtu l’apparence. Aussi, il ne perdit pas de temps pour s’enfoncer dans le port, à l’opposée des quais où Sabaru trouverait sûrement son semblable.
En soit, le hangar susnommé n’était pas des plus difficiles à trouver. Situé en plein centre de la partie nord, il surplombait par sa hauteur bon nombre de ses pairs. Au-delà de sa position se trouvaient les postes de contrôles de la frontière, où il avait eu le loisir d’officier lors d’une mission antérieure. Nul doute que cette connaissance du terrain lui serait utile en cas de renforts. Il entreprit de soulever plusieurs sacs de pierres et de marchandises lorsqu’un second de navire hurlait à une foule anonyme de lui venir en aide pour son départ ¬– il avait ainsi une couverture aisée, qu’il pourrait quitter à sa convenance devant l’intérêt absent que donnait cet homme à ses confrères. Pour lui, ils n’étaient qu’une masse informe, et Aditya tournerait très certainement cet ego surdimensionné à son avantage.
Ses « fonctions » divergèrent jusqu’à un point optimal pour la surveillance de l’entrée du hangar, gardée par deux hommes qui donnaient l’air de prendre un peu de repos autour d’une cigarette – ou tout du moins son équivalent – étant donné la forte odeur de tabac qui régnait dans les environs, cela ne l’étonnait pas. Cependant, les regards précis qu’ils lançaient à leurs alentours étaient un gage de suspicion suffisant au blond pour noter mentalement leur présence. Aucun doute, ces deux margoulins montaient la garde. Alors qu’il voulut détourner le regard pour s’atteler à d’autres observations, un troisième membre rejoins le duo de chaperons, échangea quelques mots à leur encontre, puis prit la place de l’un d’entre eux. L’homme avec qui il s’était substitué commença à suivre un chemin précis autour du hangar, allant même jusqu’à s’approcher plus près des docs pour couvrir une plus grande distance. Aditya dû inévitablement se dérober à son regard, se concentrant sur sa tâche faussement officielle. Il étudia d’une oreille attentive le langage des matelots pour en mimer les… nuances.
« Ohé ! Par où on dépose ces poiscailles m’si-… cap’tain ? »
Aucun doute… Aditya n’aurait jamais pensé entendre ces mots sortir de sa bouche, ne serait-ce que par inadvertance. Mais si sa « mission » d’offrandes avec Sabaru lui avait apprit une chose, ce fût que les apparences étaient un gage de réussite lors d’infiltrations. Il se devait de jouer le jeu, et même si sa maladresse certaine quant à la nouveauté de la situation était pleinement visible, elle confirmait ce côté gauche des adorateurs des mers. Il reprit contenance en écoutant les directives du second, s’empressant de déposer les barils à bon port ; l’espace de quelques secondes, il perdit le patrouilleur des yeux.
Une fois une partie de sa couverture confirmée, il jeta un coup d’œil hasardeux au hangar, où les trois saltimbanques s’étaient réunis une nouvelle fois. Seulement… Ils ne constituaient à ses yeux que des cibles potentielles de henge, qui n’étaient délimitées qu’à l’extérieur. Il décida de rester quelques instants encore à ce point d’encrage, si d’aventures d’autres visages daignaient ce montrer.
Et il eut raison. Quelques dizaines de minutes plus tard, un quatrième homme rejoignit l’entrée l’espace de quelques secondes, comme s’il collectait les rapports avant de retourner à l’intérieur. Sans perdre de temps, Aditya délaissa son poste de matelot pour se mêler à la foule, déceler quelques détails supplémentaires et rejoindre de nouveau les toits plus au sud. Il en avait vu assez. Désormais, les tours de garde et gradés étaient connus du trio Si Reikan et Sabaru avaient eu autant de chance que lui, nul doute que cette brève patrouille ferait la différence dans l’interpellation.
Cette histoire de bateau monopolisant tout un pan du port Naragasa les jeudis ne lui était décidément pas étrangère. Quelques semaines plus tôt, alors qu'il était mandaté pour participer aux préparatifs de l'Académie, il avait eu affaire à un certain capitaine lors de sa recherche d'un navire capable d'acheminer les ressources d'une île à l'autre pour le compte de Kiri. L'enquête d'Asayo Shinju, sa partenaire du jour, avait démontré qu'il était connu pour bloquer le port les jeudis, même aux honnêtes pêcheurs ; il avait d'ailleurs laissé une petite impression désagréable au déchaîné, avec ses hommes, lors de la discussion ayant précédé son éviction de la liste des candidats.
Il s'agissait du capitaine Daiki, et de son navire l'Itsuzai ; en témoignait son imposant navire qui mouillait dans la zone des quais qu'il avait vraisemblablement l'autorisation de se réserver exclusivement. Depuis l'une des ruelles débouchant sur les quais, Sabaru guettait, s'étant séparé d'Aditya qui continuait sa route pour rejoindre l'entrepôt non loin. Après quelques minutes de surveillance, embusqué, il se décida et adopta l'apparence de l'un des hommes chargés du transport de marchandises, dès lors qu'il s'engouffrait dans l'allée marchande qui menait au port.
✦ Trouvez qui est le capitaine faisant la liaison entre les yakuzas de Kiri et Tatsuzô de Mizu no Kuni (le capitaine Daiki et son navire "Itsuzai")
Marchant vite, il savait déjà ce qu'il avait à faire. Plus loin, le Panier de Moules était amarré ; c'était le bateau d'Etsuji, le capitaine qu'il avait choisi avec Shinju, et qui avait tenu sa parole avec honneur et respect envers la Brume, en témoignait l'avancement du chantier et la coque renouvelée de son navire. Je dois mettre la main sur cet intendant, il saura m'aider. Alors qu'il prenait pied sur le ponton de bois permettant de gagner le pont de l'embarcation, il fut arrêté par une main lourde, cramponnée à son épaule.
— Où crois-tu aller, mon garçon ?
La barbe rousse emmêlée et peu soignée, le ventre rebondi, mais les yeux vifs et bien lucides de l'homme ne laissaient pas de doute sur son identité. Il s'agissait du capitaine en personne, Etsuji. Sans hésiter une seconde, le déchaîné fit volte-face, tirant au loup de mer une moue suspicieuse.
— Au nom de la Brume et des liens naissants entre votre équipage et le village, je vais vous demander de ne rien dire de ce que vous allez entendre. — Tout ce que tu veux. Mais qui t'es, d'abord ? — Je serai ravis de vous en dire plus au bord du Panier de Moules. Faites venir votre intendant, aussi, il serait plus à même de vous parler de moi.
Hochement de tête entendu, puis les hommes cheminèrent jusqu'à la cabine du capitaine, suivis de près par le fameux intendant qu'avait hélé Etsuji en donnant un peu de sa voix rocailleuse et tonnante. Le roux s'installa confortablement dans son siège rembourré, face à un bureau subissant les affres du temps et du manque de rigueur de son propriétaire. Pour seule entrée en matière, il leva les mains d'un geste presque théâtral vers Sabaru, avant de les reposer lourdement devant lui. Un signe suffit au genin pour mettre fin à sa couverture provisoire.
La réaction de l'intendant ne se fit pas attendre, lorsqu'il entrevit le visage du déchaîné sous sa capuche, qu'il s'empressa de retirer.
— Etsuji, c'est le garçon qui s'est occupé de nous recommander pour le boulot de transport de minerais. — Un Kirijin, donc ? Qu'est-ce que tu faisais à couvert au sein même de ton village, mon pote ? — J'ai été chargé d'une enquête sur les quais, notamment du côté du capitaine Daiki et de ses étranges lubies du jeudi. Comme il est plus que probable que des corrompus pourrissent nos rangs, notre équipe se déplace à couvert. — Et qu'est-ce qu'on peut faire pour toi ? C'est plus trop de mon ressort, ces histoires de Daiki... il est pas commode, qu'on dit. Nous autres, marins, on se connait un peu tous, et l'info' circule vite. Bizar'ment, tout c'qu'on sait sur Daiki, c'est qu'il vaut mieux ne rien savoir. — J'ai juste besoin de savoir à quelle heure approximative il lève l'ancre ; j'aimerais aussi m'assurer que je puisse utiliser l'apparence de l'un de vos marins un moment, histoire de ne pas avoir de problèmes de couverture. Je ne peux pas éliminer quelqu'un pour le remplacer, ici ; nous sommes à Kiri. Enfin, si vous vous sentez d'humeur à rendre service, j'aurais bien une tâche à vous confier.
Le loup de mer inspira profondément, ses doigts pianotant contre le bois vieilli de son bureau. Il adressa un regard à son intendant, que l'intéressé soutint en hochant la tête. Il quitta ensuite le bureau, laissant Etsuji et Sabaru seuls, dans le silence tout relatif de la cabine grinçante qui bougeait au rythme des flots.
— Bon. Daihashi va aller te noter deux ou trois infos sur les habitudes de l'Itsuzai, pour qu't'aie ça sous la main. Il va aussi s'occuper de la moule dont tu vas pouvoir usurper l'identité aujourd'hui ; j'te préviens, par contre, j'veux pas qu'il ait des ennuis à cause de vous aut' shinobis. Vous êtes bien gentils, mais vous avez une certaine propension à créer des ennuis là où y en avait pas. Quant à ta fameuse tâche... dis-m'en plus. — C'est très simple. Je ne doute pas en nos capacités à mener notre mission à bien sans accrocs, mais dans l'éventualité où Daiki serait alerté de ce qu'il se passait, j'aimerais m'assurer que nous pourrions compter sur votre réactivité pour l'empêcher de quitter le port Naragasa sans encombres. — Tu veux que j'foute mon Panier d'Moules en danger, c'est ça ? — Entre autres. — T'es givré, mon grand. Mais j'verrai bien. Compte pas trop là-dessus, mais j'vais voir ce que j'peux faire. Si c'est trop dangereux pour mes p'tites moules, on boug'ra pas, mais sinon... ce satané Daiki quittera pas l'port, parole d'Etsuji.
Alors qu'il donnanit sa parole, l'homme frappa du poing contre son bureau, qui menaça de s'effondrer. Au même moment, l'intendant Daihashi entrait dans la cabine, accompagné d'un mousse — ou plutôt, d'une moule, comme disait Etsuji — qui semblait avoir été tiré du sommeil tout récemment. L'homme fournit ainsi au Kirijin une note repliée en quatre, puis lui adressa une tape amicale à l'épaule.
***
Quelques minutes plus tard, le faux matelot rejoignait la ruelle où il était supposé rejoindre ses deux coéquipiers de l'occasion. Arrivant vraisemblablement bon dernier, il fit miroiter son bandeau de Kiri en s'approchant de Reikan et d'Aditya, pour leur signifier que c'était lui. Soulagé, il constata qu'aucun des deux n'était blessé, ou ne laissait présager qu'il avait eu à fuir. Ils avaient donc probablement fait leurs parts sans encombres, comme prévu.
— J'ai pu m'assurer de l'identité du capitaine, un certain Daiki que je connais déjà. J'ai récupéré deux-trois informations sur lui auprès d'un contact du port, dont on se servira en temps voulu. Venons-en aux faits : l'entrepôt, et les gardes. Qu'avez-vous appris ?
L'heure était à la mise en commun. Avec un peu de chance, ils pourraient vite entrer en matière, et profiter de ces préparatifs pour faire de leur intervention un raid éclair et sans bavures.
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Dernière édition par Nō Sabaru le Mar 14 Mai 2019 - 18:39, édité 2 fois
Après s’être faufilée avec la plus grande des discrétions entre les artères mercantiles du port, Reikan s’affaira donc à retourner au point fixé par le déchaîné, pour mettre ses informations en commun avec ses coéquipiers. Une fois assez rapprochée de l’entrepôt, elle prit la direction de la ruelle ciblée pour attendre Sabaru et Aditya, dans l’obscurité offerte par la hauteur des bâtisses. Dans l’attente de leur retour, la féline prit soin d’illustrer, à l’aide d’un crayon de bois et d’un petit carnet de note, les portraits de chaque garde et de chaque policier dont la fidélité à la loi avait été altérée. Retranscrire de telles indications était une aubaine pour le trio de missionnaires, afin de repérer au plus vite les corrompus sur le terrain. Et ce fut chose aisée pour la jolie brune, qui avait un sens du détail très prononcé et une mémoire similaire à un puits d’informations. Une fois en leur compagnie, la tigresse blanche leur exposa l’ensemble de son infiltration, avant d’en venir à l’essentiel.
« Il y a environ une dizaine de gardes impliqués du côté de la garnison. Et qui plus est, des membres de la Kenpei sont dans le lot, bien qu’ils se comptent sur les doigts d’une main. De ce que j’ai pu comprendre, ils possèdent un laboratoire et sont censés livrer une part de leur production illégale dès ce soir. J’ignore où se trouve cette officine de pacotille, mais j’imagine que par précaution, des brigands de leur genre n’hésiteraient pas à la placer au cœur même de leur bateau. »
Aux deux jeunes hommes, la changeforme présenta les visages des dépravés, quelque peu… caricaturés. Néanmoins, la précision du coup de crayon de Reikan pouvait permettre à l’enfant du bois et au déchaîné de se faire une idée de ce à quoi pouvaient ressembler les félons, pour mieux les appréhender. De fait, elle leur proposa différentes options concernant l’infiltration, qui nécessitait l’usage de la métamorphose. S’il y avait des portraits de tous les horizons parmi ceux ayant croisé son chemin - allant de l’homme brun et trapu, en passant par le grand blond élancé, jusqu’au maigre ténébreux -, ses confrères avaient également un large choix quant à l’allure que pouvait donner leur emprunt d’enveloppe charnelle – allant de l’air le plus fourbe au plus innocent. Ainsi pouvaient-ils se faire une idée suffisamment précise du comportement qu’ils devaient adopter pour ne pas tout faire foirer, une fois sur place.
« Nous n’aurons aucun mal à nous infiltrer dans un tel trafic. En plus d’être très indiscrets, ces gardes ne m’ont pas l’air très habiles de leur matière grise. »
Aditya fut le premier à rejoindre la métamorphe sur la toiture de tuile d’un bond souple, ses pas résonant sur le haut de leur perchoir du jour. Il tâcha néanmoins de se dissimuler à la vue de curieux en contrebas ; l’aurore baignait d’ores et déjà de sa lumière le port Nagarasa, et toute silhouette visible à cette heure-ci au sommet des bâtisses ne pouvaient qu’éveiller les soupçons, cela, l’enfant du bois en était pleinement conscient. Voilant ainsi sa présence aux plus curieux – qui n’auraient sûrement vu passé qu’une ombre brève – il glissa un regard intrigué aux crayonnés de Reikan qui s’était retranchée dans le renforcement des tuiles, tandis qu’une silhuette avait semblé se faufiler dans son dos.
Mais glissant un regarde alerte par-dessus son épaule, il fut rassuré de reconnaître la silhouette de leur comparse et non pas celle d’une de leur cible qui aurait profité d’un moment de faiblesse pour inverser la filature. Il adressa un hochement de tête à l’encontre de Sabaru lorsque celui-ci soulevait son bandeau comme signe de reconnaissance entre l’équipe brumeuse, comprenant qu’il ne s’agissait point d’un mirage utilisé par les renégats et qu’il ne s’agissait de nul autre que du déchaîné. Apparemment celui-ci n’avait pas chômé au vu des informations qu’il leur conféra, bien que succinctes. Cependant il ne doutait pas qu’en temps voulu, l’enquête indépendante de leur compère au port ne tarderait pas à porter ses fruits. Son attention fut redirigée vers la féline alors qu’elle prenait la parole, ses bras croisés dénotant tout son intérêt pour son propos.
S’il ne fut pas surpris par la confirmation de membres de la Kenpei au sein de cette criminalité portuaire, ce fut leur nombre qui le fit hausser un sourcil. Certes, compter les renégats sur les doigts d’une main semblait en l’état ne pas poser de problèmes, néanmoins ils représentaient au minimum la moitié des forces à démanteler, ce qui ne manquât pas de l’inquiéter quant à la cohésion des forces de police en ces temps troublés. Lorsqu’elle évoqua la possibilité que le laboratoire ait prit place sur l’un des navires du port, il ne put s’empêcher de faire l’hypothèse que l’enquête de la métamorphe n’aille de paire avec celle de Sabaru. Mais dans ce cas là… Que peuvent-ils protéger de plus important dans ce hangar ?
Il patienta néanmoins jusqu’à ce qu’elle ait terminé son rapport, avant de commencer à étaler les conclusions de ses observations personnelles.
« De mon côté, j’ai pu observer quelques comportements suspects aux alentours du hangar, comme vous pouvez vous en douter. Deux hommes montent la garde en permanence devant l’entrée, pendant qu’un troisième s’occupe d’un tour de garde. De plus, toutes les demi-heures je dirais – ça n’est qu’une conjecture – un quatrième homme sûrement plus gradé échange quelques mots avec eux, sûrement pour collecter leurs rapports. D’après ce que j’ai pu comprendre, chaque tour de garde prend entre dix et quinze minutes. Du départ du hangar au centre du port… je dirais que nous aurions une marge de manœuvre de 2 minutes, peut-être trois pour se substituer à l’un d’entre eux avant qu’ils ne remarquent son absence. Evidemment, il faudrait prendre sa place à la garde de l’entrée le temps que l’un d’entre nous ne rejoigne le premier infiltré. »
Il marqua un temps de pause l’espace d’un instant en joignant ses doigts afin de convoquer la fameuse technique de métamorphose. Après que le bref nuage de fumé se soit dissipé, Aditya arborait l’apparence de l’un de ces trois galopins.
« Je n’ai pas les talents artistiques de Reikan, néanmoins j’ai pu m’approcher assez près de ces gredins pour être capable de copier leur apparence. »
Comme pour apporter plus de poids à ses propos, il changea d’apparence une deuxième fois, puis une troisième, et enfin une quatrième afin de retranscrire les traits des trois gardiens et du collecteur d’information à ses comparses.
« Mais je suppose que nous devrons d’abord commencer par échafauder un plan. J’imagine que tu as déjà une idée derrière la tête sur ce sujet, Sabaru. », glissa-t-il sur un ton assuré, après une brève œillade au déchainé.
Les nouvelles ne l'enchantaient assurément pas, mais il ne pouvait que se rendre compte de l'avantage que ces connaissances leurs conféreraient. Si une dizaine de membres de la Kenpei étaient impliqués, ils ne pourraient pas faire confiance à grand monde. Ces pourritures seraient de véritables épines dans le pied ; les membres de la police, en particulier la garnison de Naragasa, n'étaient pas à sous-estimer. Mais une idée avait vite germé dans la caboche du déchaîné, lorsque Reikan s'exprima tout d'abord.
Ses mains se joignirent, et son chakra s'extériorisa pour donner vie à une seule et unique de ses copies conformes, qui prit sa véritable apparence de Sabaru, et non celle du marin dont il avait emprunté le visage.
— Je m'occupe de transmettre ces infos à l'un de mes contacts de la police, qui ne travaille pas sur les docks mais à proximité de la prison Yuki. Avec un peu de chance, il permettra de totalement neutraliser la menace venant des corrompus du port ; au pire, il les ralentira.
Le clone s'empara du carnet de Reikan, ainsi que d'une mine de charbon, pour y annoter les instructions suivantes :
« À l'adresse de Hirohito,
La garnison du port Naragasa comporte quelques hommes corrompus, ci-joints leurs portraits approximatifs. Dans le cadre d'une mission, nous enquêtons actuellement sur les docks, et vous serions gré de nous porter main forte en gérant ces éléments perturbateurs. Leur culpabilité n'étant pas appuyée par des preuves solides actuellement, nous apprécierions que vous les reteniez au mieux jusqu'au soir. Nous vous ferons parvenir des noms précis dès que nous mettrons la main dessus, vous permettant de faire le tri dans les effectifs figés et d'attribuer des chefs d'accusations adaptés à l'implication de chaque individu.
Nō Sabaru, genin de la Brume. »
Ceci fait, le clone arracha les quelques pages du calepin qui lui seraient utiles, puis s'éclipsa en vitesse, en prenant la route du nord du village.
— Par précaution, le clone ne rejoindra mon contact que d'ici une heure. Ainsi, si par malchance il venait à être de mèche ou a laisser filer l'un des corrompus par mégarde, nous en aurions déjà fini avec l'entrepôt. Une fois sortis, la police ne pourra qu'alerter le capitaine renégat, et j'ai déjà ma contre-mesure.
Sur le papier, rien ne pourrait dérailler si son plan se déroulait comme prévu. Les rares cas de figure qui pourraient le mettre à mal ne pourraient faire irruption que lors de l'étape suivante, celle de l'infiltration dans l'entrepôt. Les informations les plus importantes s'y trouvaient, et si ils ne mettaient pas la main dessus, l'opération serait un fiasco intégral. La gangrène des forces de l'ordre ne pourrait même pas être accusée, sans les preuves, et ce serait l'équipe du maître des liens qui finirait par avoir des problèmes pour leurs accusations infondées.
— Pour en revenir à ce qui nous concerne immédiatement, je pense qu'il serait judicieux de procéder comme suit dans la marge d'une heure que nous avons : nous allons attendre que le garde chargé de relever les rapports face surface, et dans la demi-heure qui suit, nous allons neutraliser les trois gardes à l'extérieur pour les remplacer par mes clones. Ceci fait, nous prendrons l'apparence de trois des membres de la police pour entrer dans l'entrepôt sans éveiller de soupçons. Comme nous n'avons pas de noms, ni d'informations sur leurs fonctions, nous devrons éviter de trop parler ou de nous faire remarquer. Selon les forces en présence, il nous faudra choisir entre tenter le coup de filet ou juste récupérer les informations, même si je préfère la première option.
De sa main gauche, le déchaîné transformé en matelot pointa quelque chose sur la gauche de l'entrepôt ; l'eau.
— Il n'y a qu'un seul angle d'approche pour rejoindre l'arrière de l'entrepôt, donc je vais nager. Là-bas, je capturerai le garde faisant sa ronde, une fois qu'il sera hors de vue des autres badauds foulant les docks. Lorsque que les gardes à l'entrée quitteront leur poste pour me rejoindre, vous devrez nous rejoindre aussi vite que possible et les prendre de dos pour les mettre hors d'état de nuire sans leur laisser le temps de demander de l'aide ; cependant, n'oubliez pas d'attendre qu'ils soient engagés dans l'angle mort de l'entrepôt par rapport aux quais.
Un contact visuel suffit à Sabaru pour s'assurer que ses deux coéquipiers avaient bien suivi ses instructions, dont la simplicité cachait la véritable importance. Si ils échouaient à cette étape, qui était cruciale, ils devraient faire une croix sur les preuves, puisque l'alerte serait donnée.
***
Il fallut une vingtaine de minutes pour que le brigand relevant les rapports des gardes montre le bout de son nez. Il n'échangea avec les deux hommes que quelques mots, puis recula dans l'ombre en tirant le lourd battant de la porte avec lui pour la sceller à nouveau. Dès lors, Sabaru se sépara d'Aditya et de Reikan, pour rejoindre les quais, précautionneusement. Il savait, grâce aux instructions des hommes d'Etsuji et aux rapports fournis, que le bateau de Daiki était constamment entouré de gros poissons agressifs ; ainsi, il choisit d'aborder l'entrepôt par le côté opposé au bateau, espérant ne pas avoir affaire à la poiscaille contaminée.
Dès qu'il fut assuré qu'aucun des trois gardes ne le voyait, Sabaru s'immergea dans les flots, en se laissant tomber droit comme un i. L'eau froide de la saison eut tôt fait de traverser ses habits et de venir le refroidir jusqu'aux os. Soit. Un rhume ne sera pas cher payé si cette mission venait à être un succès. En nageant rapidement jusqu'aux entrepôts en restant immergé le plus longtemps possible, le déchaîné garda tous ses sens en alerte, et regardait nerveusement autour de lui au cas où l'une des sales bêtes de Daiki ne serait lancée à sa poursuite. Ainsi agité, il peina à garder son calme et arriva très rapidement à court d'oxygène. Se faisant violence, il parcourut une poignée de mètres, avant de remonter à la surface pour prendre une grande bouffée d'air.
Alors qu'il ouvrait les yeux, Sabaru put distinguer une silhouette, au bord des quais entourant l'entrepôt. Immobile, l'homme semblait tout aussi choqué que lui de le voir. D'abord tétanisé par la peur, le maître des liens ne fit pas même un geste. Il venait d'être découvert...
— Donburi-san ? C'est toi ?.. Je croyais que tu étais mort en mer...
Pardon ?
— J'ai dû veiller seul sur Mama, après ton départ ! Tu nous avais donc abandonnés ?! — Je ne suis pas sûr que Mama soit très fière de ce que tu es devenu, alors tu es bien mal placé pour me juger. — Hein ?
Choqué par la dureté des propos du présumé Donburi, le garde en pleine ronde ne vit pas venir la chaîne qui transperça les flots pour venir lui saisir la gorge. L'instant d'après, une décharge électrique vint le figer sur place, laissant juste assez de temps à Sabaru pour quitter l'eau et l'assommer d'un violent coup de poing ganté de chaînes. Il traîna ensuite le corps inerte du pauvre hère dans l'ombre de l'entrepôt, avant d'emprunter son apparence.
Toujours sous le choc de son coup de chance légendaire, digne de ceux de Reikan au Riichi, Sabaru émergea au grand jour, sur la droite des deux gardiens de la porte de l'entrepôt. Ne préférant rien dire, il leur fit signe en adoptant une mine alarmée, puis s'élança vers l'arrière de la bâtisse en attirant les deux hommes à sa suite. Sans oser regarder derrière lui, il espérait que les deux autres avaient commencé à agir. Il n'aurait pas l'air fin, si les deux types avaient le temps de tomber sur le corps de leur comparse, alors qu'il venait justement de les alerter.
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Dernière édition par Nō Sabaru le Mar 14 Mai 2019 - 18:42, édité 2 fois
Sans attendre, Reikan mit son carnet de notes et sa mine de bois à disposition du déchaîné, avant que celui-ci n'aille entre les mains de sa copie pour transmettre les informations à son contact. Pendant que Sabaru dégainait sa stratégie - sans failles, en apparence -, la féline lui accorda une attention toute particulière, pour ne pas perdre une miette de ses instructions. Nager dans cette eau glacée? Je savais qu'il avait du courage, mais à ce point... La façon de penser et d'agir de l'homme plaisait à la jolie brune, qui ne manqua pas d'afficher un rictus au coin de ses lèvres charnues. Enfin, prendre à revers des malfrats, ça ne me changera pas de mes habitudes. J'espère qu'Aditya suivra le rythme, auquel cas je devrai lui montrer le chemin, une fois sur le terrain. Et si le blondinet n'était pas connu pour être un grand débile, la féline lui accorda tout de même un regard inquiet, avant qu'il ne soit imprégné par sa confiance naturelle pour la lui transmettre, indirectement. Ainsi, l'étape de neutralisation des gardes et d'infiltration dans l'entrepôt avait été lancée, dès l'instant où Sabaru s'empressa de rejoindre les quais en toute discrétion. Quelques secondes suffirent à la changeforme pour trouver une solution récurrente au problème que représentait Aditya, dans leur tentative d'étouffement de la surveillance corrompue.
« Pour n'éveiller que l'intérêt des gardes et non pas leurs soupçons, tâche de prendre l'apparence d'un humain assez... innocent, pour simuler une course-poursuite sans importance. »
Aussitôt, la féline sortit un kunaï de sa sacoche ninja avant d'attraper son manche entre ses canines. Et sans user du moindre signe incantatoire, Reikan délaissa sa forme humaine dans l'ombre de la ruelle de retrouvailles, pour trouver celle d'un chat assez élégant. Si elle s'était transformée elle-même, elle avait aussi prit soin de changer l'apparence de l'arme ninja qu'elle détenait, en lui offrant celle d'un petit paquet cadeau. Ses paupières clignèrent plusieurs fois pour s'adapter à la vue propre aux félidés, avant de bondir très habilement sur un caisson de marchandises. Reikan offrit une œillade convaincue à son meilleur ami, pour s'assurer qu'il était prêt, avant de s'élancer dans la ruelle. Tout en portant son cadeau dans la gueule, le chat partit au pas de course entre les civils jonchant son chemin, tout en prenant la peine d'attendre qu'Aditya ne le perde pas de vue après avoir lui aussi pris une apparence adaptée à la situation.
Et lorsque ce fut chose faite, la métamorphe s'enquit de traverser la multitude d'artères séparant le duo de l'arrière de l'entrepôt. Sans emprunter la voie aérienne pour ne pas se faire repérer et convoquer l'alerte générale des brigands, Reikan guida son ami avec efficacité et rapidité, bien que sa vitesse sous cette forme de chat domestique pouvait être égalée par un enfant fou furieux - ou du moins, par un shinobi ayant pris l'apparence d'un marmot. Il était temps aux missionnaires de faire leurs preuves pour accompagner le déchaîné dans sa principale tâche. Une fois assez proches de l'entrepôt, le chat détala à toute vitesse sans accorder un regard aux gardes, qui, ébahis, fixèrent le gamin poursuivre son animal.
« Eh... t'as vu ça? Il bombarde, pour un putain de chat. – À la place du petit, à mon âge, je l'aurais caillassé au lieu de le courser. Ça va plus vite, HAHA! – T'as raison. Bon, t'as pas un peu faim toi? »
Après sa pointe tapée devant les gardes, Reikan dérapa de ses coussinets contre les pavés pour mieux prendre le virage, et sortir de leur champ de vision. Manifestement, le plan a l'air de marcher. L'un d'entre eux a même... baillé. La changeforme continua sa course en s'assurant toujours qu'Aditya n'avait pas perdu le fil, jusqu'à arriver à la zone des quais, qu'elle franchit de plusieurs bonds félins. Son ouïe sur-développée lui permit d'entendre le bruit de la chaîne en pleine action de son confrère, ainsi que les pas alertés des deux autres gardes. À nous de jouer. Le chat fit une courte pause pour indiquer à Aditya la provenance des voix, en pointant avec sa queue souple la direction adéquate, pliée comme une véritable équerre. Ni une, ni deux, la kunoichi prit un sombre raccourci entre les infrastructures collées à l'arrière de l'entrepôt, pour rejoindre au plus vite leur compagnon de mission.
Et une fois révélée à la lumière du jour, Reikan analysa les environs avec un œil assoiffé de détails. Son instinct animal ne l'avait pas trompée, puisque cette petite veine les firent déboucher juste derrière les deux gardes poursuivant leur compagnon. Le chat qu'elle était prit alors une impulsion considérable sur une caisse en bois sur son parcours, avant de s'élancer à une vitesse anormale sur l'un des traqueurs. En pleine charge, le petit animal domestique vit son corps muter, pour adopter une apparence aussi féminine que somptueuse. Quant au papier cadeau, la jolie brune l'envoya vers Aditya qui se trouvait à ses arrières, révoquant aussi son trompe l’œil pour révéler son kunaï une fois entre les mains du blond, qui devait remplir sa part du travail. Le garde en question n'eut même pas le temps de réagir, au moment où il sentit ses jambes se faire faucher par la tigresse blanche, qui se retrouva accroupie devant lui. Elle accorda un regard assuré à l'autre dépravé, avant de sortir un fil de fer de sa sacoche et de bloquer les bras de sa proie mise à mal. Pour la touche finale, elle déchira un bout de tissu de la tenue du garde, pour l'enfouir entre ses dents et le faire taire, au cas où il essayerait de pousser une gueulante infernale. De toute façon, au vu de la force du coup porté à ses chevilles, il n'allait pas se relever de sitôt.
résumé:
Santé: Pas un poil de perdu. Chakra: 1C 1D ; La réserve est pleine à en déborder.
Le regard d’Aditya jonglait entre le déchaîné et la féline lorsque leur plan fut échafaudé sur ce toit à l’abri des regards, prenant tout le temps qui lui était nécessaire pour comprendre les tenants et aboutissants de leur assaut à venir. Une fois les repérages faits, ils devaient désormais pénétrer à l’intérieur du hangar et recueillir les précieuses informations qu’il détenait. Et bien qu’il ne soit pas encore passé maître dans l’art de la dissimulation, il maîtrisait néanmoins avec facilité la technique de camouflage propre à chaque shinobi. Ainsi, dès lors que Shiroitora lui donna quelques conseils sur l’apparence à revêtir afin de faciliter leur entrée, il s’exécuta et prit soin de s’afficher aux yeux de ses comparses sous des traits enfantins qui lui ressemblaient étrangement – certainement ceux qu’il détenait au même âge. Il délaissa un sourire amusé lorsqu’il distingua la forme féline qu’arborait Reikan, et du cadeau maintenu entre ses crocs qui cachait en son sein l’arme de jet signature des ordres ninjas.
Alors qu’il adressait un dernier regard entendu à Sabaru, Aditya bondit jusqu’aux sinueuses ruelles à la suite de la métamorphe. Dès lors qu’il la vit accélérer le pas, il comprit que le jeu des apparences avait débuté et se mit ainsi à courir à toute allure à ses trousses, en ponctuant sa route de protestations enfantines à l’adresse du chat nébuleux ; nul doute que les deux genins donnaient aisément le change au sein du port Nagarasa. Plus ils s’avançaient, et plus les voix des gardes étaient distinguables de tout autres. Pour le moment, tout a l’air de se passer sans encombres. Sabaru ne devrait pas tarder à nous envoyer le signal… Redoublant d’ardeur, il rejoignit le félin dans l’angle mort des quais, et attendit patiemment la venue des gardes qui seraient alertés d’un moment à l’autre par la diversion du déchainé. Reikan, quant à elle, ne manqua pas de le prévenir grâce à ses dons de leur venue anticipée, si bien qu’il put se préparer du mieux possible. Leur comparse s’élevait d’ores et déjà depuis l’écume de la mer, indiquant au blond que le moment était venu pour eux de se retourner contre leurs poursuivant. Ils ont mordu à l’hameçon plus facilement que prévu. Ne quittant pas sa partenaire des yeux lorsqu’elle s’aventura sur les caissons et les toits, il s’avança à son tour en joignant ses mains, donnant l’impression de chercher à attraper un insecte illusoire – papillon, abeille, n’importe quoi pouvant se substituer à des jeux enfantins. En réalité, il malaxait son chakra en toute discrétion afin de tendre une embuscade au gourgandin qui se profilait dans sa direction.
Le saut de Reikan sonna le glas de leur attaque. Dès lors que le kunaï reprit son apparence originelle et qu'il fut lancé à son encontre, Aditya s'en empara en revêtant de nouveau son aspect adulte tandis qu'une ronce téméraire venait faucher les chevilles du garde laissé à ses bons soins. Sans perdre de temps, son arme de jet vint frôler le visage de sa cible, cherchant à étouffer une plainte par la surprise de l'attaque. Le blond joignit de nouveau les mains avant de réceptionner le corps du garde avec une série de coups de poings habiles... jusqu'à ce qu'un bloc de bois ne vienne frapper l'arrière de son crâne, le sonnant sur le coup sans même lui laisser le temps d'appeler à l'aide. La paume maintenu sur son corps inerte, il maintenu un mudras unique et pu alors imiter à la perfection les traits de l'homme inconscient.
Aditya avisa un regard vers la féline, puis à Sabaru alors qu'il traînait sa carcasse près des caisses de bois, avant de la dissimuler à l'intérieur de l'une d'entre elles. Il n'y avait désormais plus de traces de son passage.
Un soupir de soulagement échappa au déchaîné, qui sentait un poids s'envoler de ses épaules. Si Reikan et Aditya fonctionnaient aussi bien en équipe, la marge d'erreur s'agrandissait, ce qui était bon à savoir dans le cadre d'une mission dite d'infiltration. Néanmoins, sa mine s'assombrit en voyant l'ascète s'affubler de l'apparence de celui qu'il venait d'éclater sans vergogne.
— Non, non. Ces types sont supposés se trouver dehors, à monter la garde, n'oublie pas.
Pour illustrer son propos, Sabaru signa des deux mains, faisant apparaître à ses côtés trois nouveaux clones. Chacun se para des atours d'un des gardes, reconstituant l'équipe de surveillance à la perfection, avant de regagner les postes de leurs couvertures respectives. L'original, quant à lui, emprunta celle de l'un des policiers qu'il avait identifiés avec les croquis de Reikan. Si c'était assez approximatif, il s'était assuré d'en choisir un... plutôt distinguable. Son indice graisseux et son allure de batracien aidaient beaucoup.
— Faites pareil, puis suivez moi. On va se répartir les tâches comme suit.
Ouvrant son fidèle carnet, le genin se mit à entourer les diverses instructions qu'il avait recopiées de l'ordre de mission, en les assignant au trio; en effet, il comptait les séparer. Aditya s'occuperait de trouver la salle où les gardes inscrivaient les techniques, Reikan devrait à nouveau faire appel à sa discrétion et à sa ruse pour surveiller la salle principale au cas où leur couverture était compromise, et lui-même irait à la recherche du fameux laboratoire sur lequel les informations semblaient être bien floues.
— N'oubliez pas : nous n'avons rien sur ces traîtres, dont nous empruntons l'apparence. Il faut éviter le dialogue, et aller droit au but sans hésiter, quitte à susciter quelques interrogations. Il vaut mieux ça que de rester planté sur place, et de vendre sa couverture en cherchant à trop bien faire.
Les consignes données, Sabaru s'assura comme d'habitude qu'elles aient bien été reçues, avant de se diriger vers la porte du hangar, laissant au duo le soin de se métamorphoser et de le suivre au plus vite.
Simulant un dialogue avec les deux gardes de l'entrée, pour confondre un éventuel observateur extérieur, le déchaîné s'avança enfin dans le hangar, en tête, faisant grincer la lourde porte pour s'y frayer un chemin. L'obscurité du lieu contrastait tant avec la luminosité des quais qu'il lui fallut quelques secondes pour s'y adapter, quelques pas prudents le guidant vers le centre de la pièce énorme et remplie de caisses et de tonneaux. Une forte odeur émanait des contenants, qui devaient contenir les étranges épices dont il était mention dans le rapport de l'équipe ayant ouvert l'enquête.
Il n'y avait que deux portes, une sur la droite, et une tout au fond. Alors que Sabaru s'écartait de son petit groupe de faux-flics, la voix d'un homme provenant de leur droite vint les héler.
— Tiens donc, Furuta-san, tu viens prendre la relève en avance ?
D'abord décontenancé, le déchaîné lança un regard discret à l'homme qui s'exprimait, qui lui fixait en particulier l'un des membres du trio; de tête, il s'agissait d'Aditya. Au moins, il connait son nom maintenant. Bonne chance. Laissant l'ascète se débrouiller, il s'avança seul en essayant de réprimer sa curiosité pour ne pas paraître suspect. Sa destination : la porte du fond, dans la partie du hangar qui était la plus encombrée et obscure. Sans doute s'agissait-il du laboratoire.
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Merci à Yume pour l'avatar
Dernière édition par Nō Sabaru le Mar 14 Mai 2019 - 18:46, édité 3 fois
En revenant vers ses confrères, Reikan se tapota les paumes l'une contre l'autre pour retirer la poussière qu'elle avait levé, après avoir fichu le corps inconscient du second poursuivant dans un caisson. Ne manquait plus qu'à s'intéresser aux directives données par le déchaîné, qui semblait tout à fait savoir ce qu'il faisait. De toute façon, Reikan lui laissait entièrement les devants, et bien qu'elle ait quelques idées en tête, elle se retint de lui laisser carte blanche. Puis, elle sortit une de ses feuilles crayonnées d'apparences, pour s'en imprégner d'une seule. Elle jeta alors son dévolu sur l'un des deux gardes qu'elle avait précédemment espionné dans la zone portuaire. Mieux vaut prendre quelqu'un dont je connais la voix et la façon de parler. Ce sera plus sûr. Et puis... s'ils se rapprochent du hangar, je ferai en sorte de ne pas les croiser et les clones de Sabaru pourront même nous alerter de leur venue. Sans l'utilisation du moindre signe incantatoire, la changeforme mit en œuvre son art d'excellence et prit l'apparence dudit garde. De taille et de corpulence plutôt normales, il s'agissait d'un homme brun à la mâchoire carrée et aux traits marqués par la malice. En bref, une vraie tronche de gangréné. La métamorphose était frappante, à tel point qu'elle pouvait retranscrire la voix du lésé sans la moindre difficulté.
Sous sa nouvelle apparence, Reikan intima à son camarade que tout était bon pour elle, avant de le suivre en traversant la porte du hangar. Son odorat fut agressé par l'odeur des épices, mais elle fit comme si de rien n'était, s'arrêtant avant les deux autres pour se poster près de la mer de caisses. Du coin de l’œil, la métamorphosée remarqua Sabaru disparaître derrière la porte du fond, avant de fixer celui qui avait intercepté Aditya. J'espère qu'il va s'en sortir, parce que... Ses yeux bruns balayèrent la salle de tonneaux, pour se déposer sur une silhouette masculine baladeuse. J'ai du travail, de mon côté. Sans rien dire, droite comme un piquet, l'usurpatrice attendit que l'homme trace sa route avant de l'interpeller lorsqu'elle comprit qu'il se dirigeait vers la porte menant au laboratoire. Elle prit toutefois soin de le dévisager de la tête aux pieds, pour desceller un insigne particulier, en vain. Il semblait que ce dernier n'était rien d'autre qu'un garde, tout comme celui dont elle avait emprunté l'identité.
« Hé, attends. Je dois transporter ces huit tonneaux à l'extérieur. Ils sont invendables, alors autant le faire maintenant. Viens m'aider, tu veux? — Euh... oui, bien sûr. Tu m'as pas l'air d'avoir bonne mine en plus, Zenji. — J'ai pas pioncé de la nuit. Allez, grouillons-nous. »
La profiteuse imita à la perfection la voix de sa victime, jusqu'à lui emprunter certains traits de son caractère qu'elle avait relevé lors de son repérage. Un homme hautain et imbu de lui-même ; voilà qui allait lui faciliter la tâche, comme elle allait épargner à Sabaru de faire face à un obstacle pendant son infiltration. Et en accorant une dernière attention à Aditya, pour voir si tout se passait bien, Reikan s'empressa de s'emparer d'un des tonneaux pour occuper le garde qu'elle avait intercepté, et gagner du temps comme elle devait le faire. Ces allers-retours lui permirent ainsi de surveiller l'ensemble du hangar.
Spoiler:
Je tiens à préciser que pour ma réponse, j'ai eu le choix entre compliquer ou faciliter la tâche à mes camarades. Le pile ou face a choisit de ne pas la compliquer.
Ça n’était qu’une fois qu’ils s’étaient tous trois engouffrés dans le cœur névralgique du port qu’Aditya réalisa son erreur. A cause de son manque de maîtrise sur le plan des arts shinobis, les formes de son henge s’étaient muées en l’un des gardes du bâtiment, et non pas celle de l’un des membres corrompus de la Kenpei. Il retint un soupir d’exaspération face à sa propre maladresse lorsqu’il entendit une voix le huer derrière lui ; comme ce à quoi il aurait pu s’attendre étant donné son apparence actuelle, il avait été remarqué. Il ne lui restait plus qu’à jouer le jeu à la perfection et, qui sait, peut-être pourrait-il tourner cet impair à leur avantage. S’il son art ninja était encore à préciser… celui du mensonge, en totale contradiction avec ses propres principes, était une connaissance de longue date ; il avait bien trop côtoyé ce genre de fourbes dans ses voyages passés qu’il serait aisé pour lui d’en faire usage. Sous couvert de vérité, il était toujours plus facile à avaler. « Furuta-san ». Noté.
« Mh, non. J’ai cru voir du mouvement un peu plus loin – dans le doute, je suis allé vérifier. Mais ça n’était qu’un gosse et son foutu chat. »
Aditya fut satisfait de ne percevoir aucune lueur de doute dans le regard de son vis-à-vis, où à sa place trônait une lueur de confiance.
« T’as bien fais, on ne sait jamais ce qui peut se tramer dans ces coins-ci. »
Tu n’imagines même pas. Aditya força un sourire simple afin d’acquiescer aux paroles du garde – ou plutôt, afin de montrer que « Furuta-san » partageait son point de vue. Alors qu’il semblait lui emboiter le pas, l’ascèse, après un moment de réflexion, profita de ce moment partagé pour tenter de glaner quelques informations qui pourraient lui être utile une fois à l’intérieur. Pour la forme, il poussa même un soupir exaspéré et fourra ses mains dans les poches de son vêtement.
« Quelque part, j’aimerai bien en savoir plus sur ce qui se passe dans ce hangar. On ne sait que le strict nécessaire pour nos tours de garde… après tout ce temps, ils pourraient nous faire un peu plus confiance. »
L’espace d’un instant, il cru avoir fait un pas de trop, en était aussi direct – sûrement des rémanences de son caractère naturel que cette première mission d’infiltration n’était pas arrivée à chasser. Mais finalement, devant le soupir équivoque de son « camarade », il se rassura. Ces deux-là semblaient bien s’entendre, et cela ne pouvait être qu’un avantage pour le blond.
« Je te comprends, ça donne l’impression d’être facilement remplaçable, même si… quelques rumeurs traînent parmi les gardes. »
Aditya lui adressa un regard suspicieux, l’air de vouloir en savoir plus sans oser le demander à voix haute ; après tout, il marchait sur des œufs. Mais… malheureusement, le garde se ravisa et garda ses secrets pour lui.
« Enfin, quoi qu’il en soit ça ne sert à rien de croire à des racontars. Au fond nous savons tous les deux que c’est la meilleure stratégie que de ne mettre que le strict minimum au courant de la situation. — Mh, t’as raison. Je vais profiter de ce qui me reste de ma pause, on se voit tout à l’heure. »
Sans demander son reste – mais tout en restant dans le personnage – Aditya prit congé de sa compagnie et fondit sa silhouette dans l’ombre d’un bâtiment à l’abris des regards et signa de nouveau la technique de transformation ; cette fois-ci, il s’agissait de la bonne apparence, à en juger son reflet dans une flaque d’eau sur le sol. D’un pas calme, il fit le tour du bâtiment afin que sa silhouette n’en ressorte à l’opposée de la porte principale. Ainsi, il ne pourrait y avoir de doute sur un quelconque croisement entre ce « Furuta-san » et l’officier dont il avait volé le visage, chose qui aurait pu empoisonner ses agissements quelques temps plus tard. Et veillant à ne pas évoquer de soupçons, il se glissa à l’intérieur, l’air le plus naturel qu’il le put grâce à un sang-froid bienveillant.
Spoiler:
Chakra : 1C 1D Santé : on point
Tirages : Afin de déterminer si le garde avait des soupçons sur mon identité (Furuta), j’ai effectué un tirage avec des numéros, les pairs étant l’absence de doute, tandis que les impairs était leur présence : c’est alors tombé sur 2. lien
Pour le deuxième tirage, il s’agissait de savoir de la même manière si Aditya était en mesure d’obtenir des informations supplémentaires de ce même garde quant à ce qu’il se tramait à l’intérieur, et qui auraient pu l’aider à mieux s’intégrer parmi les membres corrompus de la kenpei. Les numéros impairs représentaient l’échec, tandis que les numéros pairs signalaient un succès : c’est tombé sur 5. Aditya n’aura donc pas d’informations supplémentaires. lien
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embrace the legacy lying in your blood, sunchild
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Dernière édition par Aditya le Mer 19 Juin 2019 - 14:29, édité 3 fois
Tandis que le déchaîné s'engouffrait dans la pièce sombre, la tigresse détourna l'attention de l'un des hommes de main qui déambulaient dans le hangar. Cette diversion, réussite avec brio, lui garantit de pouvoir fouiner en paix, sans avoir à s'inquiéter de la présence d'observateur suspicieux. Il ignorait tout des accréditations de l'officier dont il avait volé l'apparence, après tout. Il n'était pas exclu qu'il soit dans son bon droit, mais la prudence lui dictait de se considérer en tant qu'intrus.
Précautionneusement, il referma la porte derrière lui, après s'être assuré qu'il était bel et bien seul. Il lui fallut quelques secondes pour s'habituer à la pénombre, seulement percée par la lumière d'une haute lucarne barrée sur le mur faisant face à la porte, donnant sur l'océan.
Il s'agissait d'une remise, poussiéreuse et vraisemblablement à peine utilisée. Les murs étaient occultés par des piles de caisses, de biens exportés en tous genres — tissus, bocaux d'herbes, livres —, tandis que le centre même de la pièce était dégagé et ne comportait qu'une table et quelques chaises. Une lanterne y trônait, ainsi qu'une pile de papiers cloués au bois par un kunai recourbé. Inquisiteur, Sabaru s'approcha et retira le kunai, afin de se pencher sur les notes. Mieux, il y fit circuler son chakra électrique, faisant briller l'arme pour faciliter sa lecture, la faisant survoler les lignes au fur et à mesure de sa progression.
« ... aujourd'hui, nos cargaisons à provenance d'Hayashi, de Hi et de Rai seront détournées sur Kaiba, où une de nos navettes les récupérera pour les acheminer sur Hakari. Les préparatifs étant terminés, nos tests et notre recherche de sujets auront lieu là-bas. »
Ci-dessous figurait une esquisse ressemblant à un plan architectural, sans nul doute obsolète et dépassé. Le reste du feuillet comportait des listes d'ingrédients, ainsi qu'une notice faisant mention d'un usage de produits expérimentaux sur les poissons des quais du port Naragasa. C'est donc avéré, ils ont quelque chose à voir avec le développement étrange de la faune aquatique aux alentours de leurs infrastructures.
✦ Trouvez la salle où les yakuzas ont installé un laboratoire pour fabriquer des drogues ✧ Saisissez-vous de preuves pour les fournir à la Kenpei
Repliant les notes, il les glissa dans sa sacoche. Le kunai perdit de son éclat tandis que le déchaîné coupait son alimentation en chakra, avant de le replanter le bois de la table, aux côtés de la lanterne poussiéreuse. Avant d'émerger de la pièce, il entrouvrit la porte, à l'affût d'un bruit de pas ou d'une silhouette. Visiblement, ils s'en tirent plutôt bien de leur côté, se fit-il en remarquant ses deux associés, sous couverture non compromise.
Une ombre passa devant lui; un garde émergeait de l'angle mort de son petit point d'observation étriqué, le dos tourné, tandis qu'il s'avançait vers le centre dégagé du hangar. Avant qu'il n'ait le temps de s'éloigner, et de quitter la relative sécurité des caisses qui encombraient leur partie du hangar, Sabaru se saisit d'un fil de fer et le glissa autour de la gorge de l'homme, pour l'étrangler tout en le tirant vers sa cachette. En dehors de quelques gargouillements, il n'eut pas le loisir de donner l'alerte, trop surpris par la présence d'un ennemi au sein même de leur supposée place forte.
✧ Arrêtez le maximum d'individus incriminés (pas de meurtre) en faisant attention aux civils alentours et en prenant de préférence les têtes pensantes
Le corps de l'inconscient finit attaché à l'une des chaises, dans l'obscure et poussiéreuse pièce d'où avait jailli le maître des liens. Solidement lié et bâillonné, il n'aurait probablement plus l'occasion d'interférer avec l'opération. D'après les estimations de Sabaru, le Kenpei devrait débarquer bien avant son réveil, d'où son acte initiant officiellement le coup de filet.
À nouveau, il émergea de la pièce, cette fois encore sur ses gardes. Les compétences de Reikan et d'Aditya, si elles leur avaient permises de rester à l'abri de toute suspicion, avaient aussi permis au roi sans couronne d'agir à sa guise, sans avoir à se presser à cause d'un quelconque faux pas. S'approchant de l'autre pièce inexplorée, il fit une halte de quelques instants près de la Yasei qui venait de rentrer dans le hangar, visiblement affairée avec un autre pourri à transporter des choses. Se penchant vers elle — ou plutôt lui, pour l'instant —, il lui glissa quelques mots, à l'abri des oreilles indiscrètes de son compère leurré.
« Dès que tu en as l'occasion, sans te faire repérer, neutralise-le. J'en ai déjà séché un, il est attaché dans la pièce du fond. Ne laisse personne y aller. »
Il fallait absolument débuter l'élagage des branches pourries, avant de s'attaquer au gros morceau — Daiki —, qu'il voulait capturé et jugé pour avoir trompé la Brume. Plus ils tardaient, plus ils risquaient de tomber sur la police qu'il avait alertée, et qui pourrait bien être corrompue. Ils seraient bien mieux hors de l'entrepôt, où ils seraient des cibles de choix pour des officiers corrompus soucieux de faire taire les témoins. Il adressa un dernier regard à sa comparse, avant de s'avancer d'un pas assuré vers l'autre pièce.
Son poing frappa deux fois, sèchement, contre le battant. Aussitôt, la porte s'ouvrit sur une silhouette d'officier à la mine patibulaire. En remarquant qu'il avait affaire à l'un de ses confrères, ses traits se détendirent.
« Vous voul-... — Enfin ! Je commençais à en avoir marre de me coltiner l'autre bleu de merde, il pose cent questions à la minute. J'me casse, débrouillez vous avec lui. »
Le gaillard s'extirpa en douce de la pièce, bousculant presque le déchaîné. En un éclair, il était sorti. Coi, le genin lança un coup d'oeil par-dessus son épaule, avant de faire face à la pièce. Sur le pas, cependant, il prit la peine de s'arrêter pour appeler le fameux Furutaditya, qu'il avait perdu de vue.
« Viens, Furuta. On aura plus vite fini à deux. »
Et sans l'attendre, il s'y engouffra. La seule personne encore dedans, un jeune homme portant les atours de la police, tirait la gueule. Bougon, il ne prit même pas la peine de saluer ses deux aînés. Eh bien, les jeunes désoeuvrés ont perdu le goût du travail. Et dire qu'il avait eu la chance d'entrer dans la police si jeune, quel gâchis.
✦ Trouvez la salle où les gardes corrompus inscrivent des techniques sur les rouleaux vierges fournis par Tatsuzô
Au vu des rouleaux vierges qui jonchaient la table, ils avaient trouvé la fameuse pièce où les techniques étaient inscrites. Des bacs, remplis d'épices, étaient même remplis de certains d'entre eux, sans doute pour être transportés incognito. Mais à ce stade de l'opération, leur mode opératoire n'avait plus d'importance: il fallait réunir des preuves, puis lancer le coup de filet. Et ce serait à Aditya de s'exercer à l'art de l'interrogatoire subtil, sur ce sujet un peu remonté; fait qui pouvait soit faciliter, soit compliquer la tâche, selon la méthode qu'il choisirait.
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Très vite, sept des huit tonneaux mis à disposition des gardes furent expédiés à bon port, dispatchés sur les lattes du quai le plus proche. D'un œil prédateur, la féline sous couverture prit soin d'observer le moindre recoin, sans toutefois paraître suspecte dans ses agissements. En revenant au fond du hangar, elle jeta une discrète œillade à l'environnement ténébreux l'entourant. En avance sur son prétendu collègue, elle prit soin de faire une pause sur le retour pour écouter ce qu'avait à dire la petite voix près des caisses, avant de zieuter la silhouette du déchaîné transformé qui s'éloignait. Un temps de réflexion lui fut nécessaire, alors qu'elle déposait déjà ses prunelles noisettes sur la dernière caisse en bois qui n'attendait que ses bras pour être transportée parmi ses sœurs. Mais la nomade, maîtresse de l'art de la métamorphose, s'arrêta net devant cette dernière ; dernier tonneau qui concluait ses petits allers-retours en compagnie de ce garde, qui avait accepté de l'aider sans broncher. Personne, hein... dommage pour toi, jeune homme. Tu n'as pas choisis le meilleur des camps. Le garde aux pensées gangrénées s'approcha de la kunoichi, qui tardait à finaliser sa tâche.
« T'es sûr que ça va aller? T'es pâle comme un mort, mec. – Tout roule. Faut juste que... je me repose un peu. – Yare yare, j'ai compris. Laisse-moi faire, va. »
Du coin de l’œil, elle le fixa de ses pupilles assombries par sa transformation, dès lors qu'il eut courbé le dos pour s'emparer de cet ultime tonneau. Et sans rien voir venir, il eut la sensation de ne plus pouvoir se redresser lorsqu'il commanda à son corps de le faire, avant de sentir une puissante douleur dans les lombaires. Au moins, à cet endroit et dans sa position actuelle, il n'aura pas de séquelles de longue durée. Affligé par le choc d'un tel coup de tibia au bas de la colonne vertébrale, les genoux du corrompu cédèrent pour laisser son corps flancher sur le tonneau. Tentant de rester neutre au maximum, Shiroitora n'afficha pas la moindre expression ; une prouesse sentimentale assez étonnante, si bien que même son regard ne témoignait d'aucune compassion envers le jeune homme. Et d'un coup de main assez bref, elle ouvrit la couvercle du tonneau pour qu'il accueille en son sein le corps affaibli du garde sans aucune difficulté, étant donné qu'il s'agissait là d'un contenant d'envergure assez imposante pour transporter les multiples marchandises du port, légales ou pas.
En le refermant sans l'once d'un remord, la changeforme releva la tête pour adresser un bref regard à ses deux coéquipiers métamorphosés, qui étaient d'ores et déjà en train de s'enfoncer vers une autre pièce perdue dans la pénombre. Elle relâcha un soupir assez rauque, déplaçant sur le côté le tonneau alourdi par le corps inanimé qu'il portait, pour ne pas éveiller le moindre soupçon... des gardes qui approchaient. J'espère qu'ils ne vont pas mettre trop longtemps. Je n'ai pas que ça à faire de jouer avec des saletés pareilles. Restant de marbre et de dos face à ses prochaines victimes, Reikan les laissa approcher sans daigner engager d'elle-même une éventuelle conversation.
« Yooow! Ce serait pas Zenji, ça? Qu'est-ce que tu fiches ici? On t'a attendu pendant un quart d'heure au moins, sur le quai. – Désolé, les gars. Mais j'avais du boulot ici. – Du boulot? Toi, mettre la main à la pâte? Attends, tu déc-... »
Sur ses gardes, la féline toujours dissimulée sous l'apparence précédemment empruntée tourna la tête pour s'assurer qu'à part ces trois zigottos, personne n'était en train de pénétrer la zone du hangar. Tant mieux, au moins... je peux faire ça vite et surtout, de manière efficace. Et en se retournant, ces derniers n'eurent pas le réflexe d'empêcher l'arrivée d'un puissant coup de pied tournoyant et retourné à leur encontre. Celui qui était en tête du trio prit la majeure partie des dégâts, avant d'emporter ses confrères pourris avec lui dans sa chute sur les caissons. Deux d'entre eux étaient encore en état de recouvrer leurs esprits ; mais à peine eurent-ils le temps de le faire que le fameux Zenji était déjà debout au-dessus d'eux, chacune de ses mains déjà déposées sur leurs crânes respectifs, pour mieux les entrechoquer l'un contre l'autre. Les deux derniers encore éveillés tombèrent rapidement dans l'inconscience, comme venait de le faire leur partenaire. Sans les brusquer plus qu'elle ne l'avait fait, Reikan les ligota à l'aide d'un fil de fer à la fois solide et fin et les dissimula dans l'ombre de l'entrée du hangar. Elle prit également soin de leur arracher un bout de leurs vêtements pour leur obstruer la bouche et les empêcher de donner l'alerte, s'ils venaient à se réveiller de leur sommeil forcé. En revenant dans le peu de lumière offerte par l'entrée du hangar, l'infiltrée s'affaira à diverses occupations comme le transport de caissons, la surveillance de l'entrée ou encore la paperasse, pour simuler son rôle à la perfection, et ce tout en protégeant avec soin l'accès à la pièce du fond, pendant que ses camarades de mission effectuaient leurs fouilles.
résumé:
Santé: Toujours pas un poil de perdu. Chakra: 2C 1D — La réserve est entamée, mais tout baigne.
D’un coup d’œil aguerris, Aditya parcourrait la salle principale du hangar dans lequel il venait de pénétrer, l’esprit tranquille. Aucune des personnes présentes ne semblait avoir fait attention à lui ou remarquer un quelconque comportement suspect ; ainsi, il devrait continuer sur la même voie, et emprunter le même caractère à chaque interaction de « Furuta ». A sa gauche, il remarqua la féline qui s’afférait à déplacer de nombreux barils sous l’apparence de l’un des gredins qu’elle avait repéré, tandis que la silhouette du déchaîné se mouvait à travers la foule dans un coin reculé. Tout semble bien se passer de leur côté… Adressant un hochement de tête aux quelques gardes postés à l’entrée, le blond déguisé affirma sa présence parmi ces rangs ; après tout, le tour de garde de Furuta était censé débuter d’ici quelques dizaines de minutes. Durant sa pause, il était légitimement autorisé à déambuler dans ces lieux sans attirer des œillades inopinées. Une poignée de membres de la Kenpei étaient également présents : eux, il se chargerait de les éviter. Certains pourraient être de fervents amis de Furuta, et devant le cruel manque d’information qu’il détenait sur son apparence du jour, mieux valait ne pas tenter le diable. Alors Aditya attendit patiemment que ces derniers quittent le hangar et que d’autres en fassent de même pour passer à l’action et emboîter le pas au déchaîné. Maintenant qu’ils étaient entrés, le véritable travail pouvait commencer : celui de s’accaparer assez de preuves pour faire plonger les plus corrompus, et se charger de mettre hors d’état de nuire les têtes pensantes.
« Entendu. »
Sa silhouette s’engouffra à la suite du déchaîné en prenant soin de refermer la porte boisée après son passage – qui sait, peut-être risquaient-ils d’être dérangés malgré le fait que les lieux soient actuellement désertés. Son regard s’échoua sur la seule présence extérieure dans cette salle, celle d’un jeune homme qui ne devait pas encore avoir atteint l’âge adulte. Pourtant, la Kenpei lui conférait assez de crédit pour garder une salle d’une telle importance : au vu des nombreux rouleaux vierges qui jonchaient les tables, leur deuxième objectif principal venait de se dérober sous leurs yeux. D’un coup d’œil échangé avec Sabaru, il comprit qu’ils devraient avant tout s’afférer à rassembler des preuves incriminantes… puis s’occuper de mettre hors d’état de nuire cette fameuse sentinelle.
Aditya ouvrit la marche vers les basfonds de cette salle, ses yeux roulant sur chacun des parchemins, tentant de repérer quelque indice que ce soit qui pourrait faire office de pièce à conviction. Mais tout ce qu’il discernait pour l’instant n’était qu’une pile de rouleaux encore scellés, aux côtés de nombreux autres portant les marques de jutsus élémentaires. Il nous faut plus que ça… des noms, des acheteurs, des vendeurs. Des personnes aussi méticuleuses ont forcément un livre de compte niché quelque part. Afin de donner le change, le blond – qui ne l’était plus vraiment, à l’heure actuelle – s’adressa à l’inconnu, histoire de montrer un peu de respect envers celui qui semblait être l’un des camarades de police de Furuta.
« Qu’avons-nous à faire aujourd’hui ? »
Mais malheureusement pour lui, le jeune homme semblait tout aussi emballé à l’idée de lui répondre qu’à leur accorder un regard. Le silence s’appesanti de plus en plus jusqu’à ce qu’il délaisse un soupir et qu’en quelques enjambées discrètes, il tacha de se rapprocher les nombreux bacs où trônaient des parchemins similaires, entre fragments d’épices et nappes de tissus destinés à dissimuler leur présence. Et alors qu’il accordait une énième œillade au jeune policier qui semblait occupé à rechigner dans sa barbe afin d’être persuadé de ne pas éveiller des soupçons incongrus, Aditya prit place derrière l’une des tables principales. D’une main, il examina l’un des rouleaux en donnant l’air de s’y intéresser, ou tout du moins plus qu’à la paperasse qui se trouvait non loin de lui : peut-être que ce qu’il recherchait s’y trouvait. D’un geste du menton, il indiqua au déchaîné de donner le change auprès de leur ami commun afin de détourner son attention de lui, si toutefois elle lui avait été accordée : vu la proximité que les divers papiers et livrets échangeaient avec leur homme, il serait bien trop vite pris à découvert. Et comme pour faciliter leur couverture, il commença à desceller l’un des rouleaux vierges devant lui, aux côtés d’un de ses pairs où une technique était d’ores et déjà inscrite. Pourvu que Sabaru l’occupe assez de temps pour que je mette la main sur ce foutu carnet, ou quoi que ce soit qui s’en rapproche le plus… Il n’y a aucune liste de commande ici. Comment peuvent-ils savoir quelle technique inscrire ?
La gueule jusqu'au sol, le cadet ne répondit pas à Aditya. Si son insubordination lui aurait valu une belle volée de la part de Sabaru, il dût se contenir, sous peine de faire voler en éclat la couverture du trio. Du coin de l'oeil, alors qu'il veillait à calmer ses propres ardeurs, le déchaîné suivit l'ouvrage du moine blond. Ce n'était pas la première fois qu'il était dans ce genre de situations avec lui, ainsi il ne fut pas étonné de se rendre compte qu'il ne commettait pas d'erreurs grossières, malgré sa vocation première qui ne présageait pourtant aucune compétence en manipulation et en mensonge.
Et alors qu'il le zyeutait, le faux Furuta lui fit un signe. Moi, occuper ce petit merdeux ? s'indigna-t-il mentalement, après avoir posé les yeux sur la cible désignée par son compère. Sans doute avait-il besoin d'une couverture. Dans ce cas, il se devait d'apporter la main à la pâte, bon gré mal gré.
« L'autre grincheux a toujours un mot à redire sur tout. Tu as besoin d'aide ? »
L'espace d'un instant, le jeune corrompu sembla changer d'expression, passant de la moue à la surprise, puis à une mine un peu plus détendue.
« Ce n'est pas surprenant que j'aie eu du mal au début, je n'avais jamais inscrit de techniques auparavant. Ce n'est pas pour ça qu'on m'a engagé. Je sais m'y prendre maintenant, mais merci quand même. »
Classique. Il suffisait de cracher sur son tortionnaire pour qu'il s'ouvre. Du coin de l'oeil, le genin surveillait Aditya, dès que l'autre se replongeait dans ses manuscrits. Décidant de faire pareil, le déchaîné s'installa sur la chaise la plus proche du jeune homme, et se munit de deux parchemins, un vierge et un modèle.
Puis, tandis qu'il se plongeait lui-même dans l'étude du parchemin à copier, il perçut dans la périphérie de son champ de vision le regard du bleu. Aiguisé et froid comme une lame de couteau. Un frisson courut le long de l'échine du genin, qui fit semblant de n'avoir rien remarqué. À ses côtés, le garçon semblait s'être remis à la tâche. Qu'est-ce que c'était que ça ?.. Malgré l'étrange regard qu'il avait perçu, le Nō se résigna à recommencer sa diversion; plus il déconcentrerait l'autre, plus Aditya aurait de champ libre pour ses fouilles.
« Les gars du capitaine Daiki viendront récupérer la marchandise dans combien d'temps ? »
Au lieu de lui répondre, le bleu lança subitement un regard au faux Furuta, qu'il ne percevrait surement pas lui-même. Puis, il se leva, et fit mine de chercher quelque chose sur l'une des étagères longeant le mur en face de Sabaru. La tension installée par ce silence, qui n'avait rien à voir avec l'effronterie dont avait fait preuve le jeune homme, prit le genin au dépourvu. Avait-il été découvert ? Comment ?
Puis soudain, l'ambiance bruyante du port Naragasa s'étouffa. Plus un son ne leur parvenait. L'agent se retourna enfin vers lui et Aditya, la mine fermée.
« T'es qui ? Et toi, qu'est-ce que tu branles ? »
Question rhétorique. En vérité, il avait compris ce dont il retournait dès le moment où le déchaîné avait mis un pied dans la pièce. La raison pour laquelle il avait été engagé était son Kekkei Genkai d'une rareté et d'une efficacité très prisées. Lorsqu'il avait discrètement activé sa technique d'amplification, suite aux premiers doutes éveillés par les voix de ses deux collègues qui semblaient avoir changé, il avait perçu l'étrange discussion, ainsi que le coup étouffé de la métamorphe asséné à sa victime.
C'est donc sans attendre la moindre réponse qu'il avait, toujours discrètement, activé son sceau d'isolation, en prévision de ce qui allait suivre. S'ils étaient découverts, si l'un des imposteurs déclenchait l'alerte, il serait coffré. Daiki en profiterait probablement pour sauver sa peau, mais il n'en avait rien à faire : en tant que jeune shinobi, il n'avait d'yeux que pour sa propre carrière, qui risquait d'en prendre un sacré coup s'il était découvert en train de fricoter avec la racaille de Mizu pour une plus grosse paie.
Ses mains s'élevèrent. Prenant cela pour un signal, le déchaîné se leva brusquement en faisant tomber sa chaise, le bras gauche levé en geste de parade. Son henge s'estompa, révélant son véritable visage à l'agent, qui ne fut même pas surpris. D'un coup, l'assaillant frappa ses paumes l'une contre l'autre, dans la direction des deux infiltrés.
L'ultrason qui en résulta était déjà, en soi, puissant; mais c'était sans compter sur l'onde de choc violente qui l'accompagna, assez grande pour emporter le duo. En dernier recours, le Nō avait fait appel à son bouclier de mailles, qui lui permit d'éponger les répercussions du choc en majeure partie. En revanche, il fut bel et bien expulsé par la violence de l'attaque, traversant la porte par laquelle il était rentré en l'arrachant de ses gonds. Il glissa sur le dos, bouclier relevé, sur une poignée de mètres. Il n'eut ni le temps ni la présence d'esprit de vérifier si son compagnon s'en était sorti.
Quand l'agent quitta à son tour la pièce, encadré d'un rideau de poussière, il ne put que constater ce qu'il avait entendu: il n'y avait plus aucun brigand dans le hangar. Avec ceux qui avaient passé leur tour de garde, accompli leurs tâches, ou été neutralisés par la Yasei, il ne pourrait compter sur personne. Seul, face à trois adversaires.
« Personne ne nous entendra, ici. J'ai veillé à tout cloisonner. Je ne vous laisserai pas détruire mon avenir, que ce soit au nom de la Brume ou pas. »
Malgré sa situation, il semblait confiant, quoi qu'un peu déraisonnable. Un ennemi cerné se montrant toujours plus dangereux, la prudence serait de rigueur face à lui, qu'importe son âge.
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Dernière édition par Nō Sabaru le Jeu 6 Juin 2019 - 19:35, édité 1 fois
Ce fut avec brio que Reikan, toujours sous couverture, continua ses allers-retours pour assurer la meilleure des surveillances à l'entrée du hangar. Si Aditya et Sabaru étaient tous les deux réunis dans la pièce du fond et pouvaient se soutenir mutuellement, la féline elle, devait se débrouiller pour ne pas éveiller le moindre soupçon aux corrompus déambulant dans ce nid de vipères. Ces gangrenés jusqu'à l'os avaient beau être limités intellectuellement, certains pouvaient faire preuve d'une perspicacité supérieure à la moyenne. Et quand bien même, la jolie brune avait une longueur d'avance sur eux ; en toute logique, sa connaissance du personnage dont elle avait emprunté l'apparence et sa maîtrise de la métamorphe lui permettaient de remplir sa part jusqu'au bout. Ainsi, elle était sur le point de terminer son énième labeur, en récupérant le dernier baril d'épices orientales déposé devant l'entrepôt. Jusqu'à ce qu'une voix rauque et provocatrice ne vienne chambouler l'exécution de sa tâche.
« Hé, Zenji, t'aurais pas vu les autres, par hasard? – Tu crois sincèrement que j'ai que ça à faire? Ils doivent sûrement être en train de se dorer la pilule au Port Naragasa en simulant la surveillance du quartier commerçant. – Les enflures... Raaahh! Venez les gars, il y a plus rien à faire. »
Toujours dissimulée sous l'apparence du fourbe Zenji, Reikan s'empara du dernier tonneau qui n'attendait qu'elle sur les pavés. Elle jeta un dernier coup d’œil aux gardes véreux qui s'asseyaient déjà sur des chaises et autour d'une table, pour mieux se la couler douce étant donné que l'heure du petit-déjeuner approchait à grands pas. Et pendant que l'un d'entre eux fut proie au relâchement, retranscrit par un bâillement d'ennui et de fatigue, la féline retourna à l'intérieur du hangar et traversa la multitude de marchandises qui jonchait les côtés du chemin. En marchant et une fois seule, le baril sur l'épaule, la jeune femme ne put s'empêcher de douter de la réussite de cette mission. C'est facile. Beaucoup trop facile, j'ai envie de dire. Et puis, ils en prennent du temps pour trouver de simples preuves papiers. Ses chaussures de travail raclèrent le sol, jusqu'à ce qu'elle atteigne le fin fond du hangar et dépose le baril parmi ses pairs. Que fabriquent-ils? Qu-... La métamorphe plissa les paupières, alors que son attention venait de se faire happer par un bruit de claquement de paumes. À peine eut-elle le temps de se redresser que Reikan aperçut la porte par laquelle étaient passés ses coéquipiers se fendre, laissant voler le corps de Sabaru cloîtré sous son bouclier de liens.
Le son s'étant échappé de ce claquement de mains vint la perturber, mais ce n'était pas suffisant pour la forcer à ne rien faire. Aussitôt, ses pieds prirent un solide appui sur le sol, lui permettant de s'élancer devant le déchaîné pour le protéger et avoir une meilleure vision de la pièce du fond. Dans son déplacement, l'apparence masculine du garde laissa place à la silhouette svelte et élancée de la changeforme ; et cette dernière terminait déjà une série de signes incantatoires assez longue. Son regard prédateur parcourut toute la zone, constatant les dégâts collatéraux qui n'étaient que le fruit de la manipulation du son. Il a fait ça, rien qu'avec le son de ses... mains? Peu importe, il faut le mettre hors d'état de nuire, avant que les autres rappliquent. Bien que par chance, le Sceau d'isolation du garde préservait le calme extérieur et n'alertait donc pas ses compères, Reikan prit la décision d'en finir au plus vite, pendant que ses bras se teintaient d'une aura immaculée.
« Reste derrière, Sabaru. On s'en charge. »
Ni une, ni deux, la kunoichi releva ses deux bras chargés de chakra Fūton en direction de la menace, tout en prenant en compte la position d'Aditya au même moment. Sans attendre et en même temps, elle expulsa de ses avants-bras deux têtes de lions de Vent, qui foncèrent immédiatement sur le garde. Sur le coup, Reikan s'arrangea de sorte à ce que chacune des têtes le prennent respectivement au dépourvu, sur la gauche et sur la droite ; et si sa seule échappatoire était de s'enfuir par les airs ou dans la terre, elle laisserait son meilleur ami s'occuper de son cas.
récapitulatif:
Santé: Tout va bien. Chakra: 2B 3C 1D — La réserve se creuse.
Résumé du tour: Reikan charge devant Sabaru pour lui offrir protection et projette sur le garde deux têtes de lions faites de chakra Fūton. Que ces dernières touchent leur cible ou non, la trajectoire des techniques choisie par la féline fera que les deux techniques se rencontreront forcément, pour créer un tourbillon dévastateur et amoindrir les chances de fuite de leur opposant.
Avec parcimonie, Aditya se rapprocha de la paperasse amoncelée à quelques pas de là, dès qu’il eut remarqué que le déchaîné s’efforçait de détourner l’attention du bleu présent au fond de la salle. Ni une ni deux, ses yeux s’écrasèrent sur toute chose laissée à la dérobée à la recherche de ce fameux livre de compte ou de quoi que ce soit qui puisse s’en rapproche le plus possible. Ses mains farfouillaient avec discrétion les parchemins entassés, si bien qu’il donnait l’air de les « ranger » afin d’éviter l’évident désordre qui s’était amoncelé plutôt que de fouiller avec avarice tout ce qu’ils contenaient. Ce ne sont que des rouleaux de techniques encore scellés… Bon sang où est ce car–
Ses doigts roulèrent sur une fine couche de cuir faisant office de reliure. Un carnet. Alors qu’il accordait une œillade à son comparse tandis qu’un silence pesant s’était installé dans la pièce, Aditya feuilleta en silence ces quelques pages… pour y découvrir une myriade de noms inscrits selon plusieurs colonnes : acheteurs, prix, objet, lieu de dépôt, date de paiement et de livraison, livreur. Tout était là. Il n’avait plus qu’à s’en emparer.
« T'es qui ? Et toi, qu'est-ce que tu branles ? »
Ils avaient été repérés. Crachant une insulte dans sa barbe – façon de parler, évidemment – le blond s’empara sans sommation de l’ouvrage et le nicha dans un des pans de son kimono alors qu’il rompait son henge à la suite de Sabaru, afin de s’assurer que l’objet ne risquerait pas de glisser ou d’être endommagé. De toute manière, cela ne servait à rien de maintenir les apparences : l’homme avait déjà lancé une attaque en leur direction après s’être assuré de leurs « mauvaises » intentions. Aditya eut tout juste le temps de former un solide bouclier de bois sur son avant-bras, légèrement abaissé vers son buste, qu'il était d'ores et déjà projeté au même titre que son comparse, son dos heurtant avec force l'un des murs porteurs. Mais alors qu'il se redressait, la silhouette de la féline apparu de nouveau à leurs côtés, bien déterminée à en découdre.
Deux têtes de lion ne tardèrent pas à fuser sur leur adversaire commun, si bien que le premier réflexe de l'ascèse fut de penser à faire appel à sa nature Katon ; pendant de nombreux entraînements et échauffourées, les deux partenaires avaient pris l'habitude de combiner leurs affinités sans vraiment le faire, histoire qu'elles en redoublent d'intérêt. Mais dans la situation présente... c'était impossible. Je ne peux pas me permettre de jeter quelques braises à l'intérieur de ce hangar... Tous les parchemins finiraient par brûler et se changer en cendres. Il nous les faut absolument. Au même titre que ce carnet... ils représentent des preuves d'activités illégales.
Heureusement pour lui, son mokuton ne présentait aucun danger, au contraire. Ses deux paumes se rejoignirent sous le signe du serpent avant que deux larges troncs d'arbres ne naissent sous les pieds du bleu, l'esprit sûrement accaparé par les deux techniques fonçant directement sur sa position, jusqu'à ce qu'ils ne finissent par totalement l'immobiliser. Ainsi, l'attaque de la métamorphe ferait mouche, sans aucun doute. Ou du moins, il l'espérait. Les signes maintenus, il ne pouvait qu'attendre, si bien qu'il adressa quelques mots au déchaîné.
« Je ne sais pas ce qu'il a pu faire pour insonoriser cette pièce... Mais nous ne devons pas le laisser faire la chose inverse. Pour le moment, ça nous arrange fortement. Mais dès que les autres entendront des bruits de combat... Notre couverture volera en éclat. »
Malheureusement, le bleu avait mal apprécié les forces en présence. S'il était certainement plus fort que les trois genins, pour avoir été admis au Kenpei aussi jeune, il était en infériorité numérique. Face à deux ennemis et demi — parce que l'un d'eux semblait avoir pris son onde de plein fouet —, il pensait pouvoir gérer, en faisant appel à ses facultés de détection avancées. Cela aurait pu marcher, bien sûr. Mais Reikan n'avait pour sa part pas été affectée par l'onde, se situant assez loin de la porte lorsqu'elle fut arrachée par le boulet humain qu'était devenu Sabaru.
La Yasei avait donc profité d'une mobilité inaltérée, et de son sang froid, pour expulser sur l'agent deux énormes gueules de lion volatiles et affamées. L'aspirant pourri, grâce à son ouïe, perçut également Aditya tandis qu'il se mouvait dans la pièce qu'il venait de quitter. Sous ses pieds, il perçut également le craquement du sol bétonné du hangar, qui cédait face au bois de l'ascète qui s'y frayait un chemin.
Il s'envola soudainement, esquivant vers le toit du bâtiment en dopant soudainement ses jambes avec une grande dose de chakra. Ses deux mains s'alignèrent ensuite vers le sol, tandis que les deux lions s'écrasaient l'un sur l'autre et que les arbres lui arrivaient dessus. De ses paumes jaillit une nouvelle onde de choc, d'une violence incomparable à la précédente, qui dissipa la tornade résultant des lions de Reikan et qui fit voler en copeaux le bois qui s'aventurait à l'approcher.
Mais cette technique, forcée par l'assaut combiné des deux genins, lui avait beaucoup coûté. Dans cette situation, il serait vaincu par épuisement. Les issues se refermaient tout autour de lui, le temps ralentissait alors qu'il se rendait compte qu'il avait joué les mauvaises cartes, aux mauvais moments. Il ne pouvait faire qu'une chose, pour se venger; car essayer de faire amende honorable ne l'aiderait pas à Kiri, après une telle traîtrise. Il devait alerter les autres, pour que Daiki leur file entre les doigts. Il leva sa main vers le plafond, à quelques mètres de lui, prêt à le faire voler en éclats...
Il sentit cependant son corps se raidir, et une multitude de petites piqûres assaillir ses membres. La force le quittait, et il n'aurait pas l'occasion de finir son geste; une dizaine d'aiguilles foudroyantes avaient trouvé leur chemin jusqu'à lui, et avaient engourdi ses muscles.
Puis son poignet fut saisi brusquement par une chaîne, qui avait longé son corps en venant du sol. L'instant d'après, son corps était violemment tiré vers le bas, si fort qu'il sentit ses os craquer sous la pression des liens. Sans qu'il ne puisse réellement se débattre, au vu de son absence totale d'appuis, il se retrouva encastré avec une violence inouïe dans l'une des caisses de bois se situant près du Nō. La main crépitante du genin, refermée sur la chaîne, était relevée juste au-dessus du corps inerte de l'officier pris de court.
« Avec un peu de chance, il n'est pas mort. »
Le Nō, ne cherchant même pas à cacher l'épuisement soudain causé par ses dépenses en chakra, lança un coup d'oeil à ses deux coéquipiers. L'électricité qui courait entre ses doigts s'amenuisa, tandis que l'autre ne donnait plus le moindre signe de vie.
« Je vais quand même l'attacher, dans le doute. Aditya, tu as réussi à trouver quelque chose pouvant nous permettre de dénoncer les traîtres ? Je pense que pour Daiki et ses hommes, nous n'aurons besoin que du hangar lui-même comme preuve. »
Sabaru s'affaira ensuite à lier proprement le pourri avec des cordes trouvées sur place, prenant bien soin de lui bloquer les mains de sorte à ce qu'il ne puisse pas faire appel à ses techniques sonores étranges pour se libérer. De toute façon, vu l'état de son poignet, il ne devrait pas se risquer à exécuter de mudrās, pensa-t-il en observant l'articulation boursouflée du jeune homme. Ses émeraudes se dardèrent ensuite sur Reikan, alors qu'il se relevait et laissait au policier véreux traîner sur le sol comme une loque sale.
✦ Fouillez discrètement le port, et surtout l'entrepôt désigné
« On devrait rejoindre le bateau de Daiki. On ne sait jamais quand il pourrait lever l'ancre. S'il venait à se rendre compte de l'absence de certains de ses hommes, et de l'arrêt de la production de rouleaux... »
Il ne finit pas sa phrase. Pour cause, il ne savait pas réellement ce qu'il adviendrait. Il avait joué une carte à l'insu de tous, mais ne saurait être certain de son efficacité. Pour en avoir le coeur net, il fit signe au moine de les suivre — quand il aurait fini, si tel n'était pas le cas — à l'extérieur. Sa paume repoussa le battant de la porte du hangar, alors qu'il ne cherchait même pas à adopter de nouvelle couverture.
Lorsqu'il passa la porte, les bruits du port l'assaillirent à nouveau. Le sceau du gamin fait toujours effet, je me demande si ça signifie qu'il vit encore, se dit-il alors, morose. À l'ambiance de Naragasa se mélèrent cependant des cris, provenant de leur gauche. S'y précipitant, Sabaru y vit ses 3 clones, encore transformés, opposés à 5 marins, au quai où était amarré le navire de Daiki. « Était », parce qu'il avait levé l'ancre et s'éloignait progressivement. Alors que le genin s'apprêtait à jurer, il vit un trait noir fendre l'horizon, avant de transpercer la coque de l'Itsuzai du capitaine forban. Un harpon ?..
En un coup d'oeil — et en tendant à peine l'oreille —, il reconnut le Panier de Moules, avec Etsuji aux commandes de l'énorme baliste montée sur la proue du bateau. Il s'était finalement acquitté de sa tâche.
« Allons-y ! Profitons que Daiki est retenu pour rejoindre son bateau, et pour l'immobiliser une bonne fois pour toute. »
Enfin, il s'élança, chaînes à la main et éclairs dans les yeux. Pour avoir essayé de berner Kiri, ce misérable pirate payerait le prix fort.
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Dernière édition par Nō Sabaru le Jeu 20 Juin 2019 - 9:32, édité 1 fois
À l'instar de son camarade qui venait de faire les frais des fouilles, Reikan était ressortie indemne de son côté, après avoir muselé dans le hangar la plupart des gardes trop curieux à son goût. Ce fut droite comme un piquet qu'elle observa ses deux têtes de lions se battre l'une contre l'autre, avant de donner naissance à une tornade d'ampleur moyenne. Mais le jeune policier, aussi pourri pouvait-il être, n'était pas décidé à se laisser abattre de la sorte. De peu, il esquiva la première offensive des bêtes de Vent pour mieux les bloquer, elles et l'étreinte forestière qu'Aditya venait tout juste de faire. La féline devait décidément passer aux choses sérieuses, pour celui qui s'apprêtait à trouer le toit et espérait prévenir son petit réseau de véreux. Mais Sabaru la devança sans chercher à comprendre en le foudroyant et en le capturant à l'aide d'une chaîne.
Ayant une confiance aveugle en son coéquipier, la métamorphe s'avança vers le corps de l'officier de la Kenpei qui était en train de se faire ligoter, pour constater la présence de son badge et son inertie. De haut, elle adressa un regard plein de rancœur à cet homme qu'elle considérait comme étant un vaurien, sourcils froncés. Comment une unité telle que la Kenpei peut-elle accorder sa confiance à de tels vicieux? C'était à cause de ce genre de corruption, auquel ce dernier s'était vraisemblablement abandonné, que la Brume était aujourd'hui gangrénée par bon nombre de réseaux criminels et illégaux. Et ce genre d'agissements, la nomade ne pouvait plus les laisser passer sans agir. Confiante, Reikan releva son visage vers le déchaîné à l'entente de ses craintes quant à l'éventuelle fuite de Daiki. Elle acquiesça d'un mouvement de tête qui fit cliqueter ses boucles d'oreilles avant de suivre ses pas, jusqu'à se retrouver à l'extérieur de l'entrepôt. Il a déjà levé l'ancre. Mais... Contre toute attente, son regard perçant, quelque peu ébloui par la lumière du jour, fut attiré par l'apparition d'un harpon fusant droit sur le navire en fuite. Et visiblement, les poursuivants de mèche furent assez résistants pour ralentir son départ, offrant une chance au trio missionnaire pour reprendre le dessus.
Reikan s'empara de cette occasion servie sur un plateau pour se jeter du quai et rejoindre le navire fuyard sur la surface de l'eau, après avoir pris soin de couvrir ses semelles d'une fine couche de chakra. Ils sont dans le pétrin. Maintenant que nous sommes là, ils ne nous échapperont pas. Sans détour, la féline s'empressa de monter sur la poulaine, endroit stratégique pour... viser au mieux le mât principal du bâtiment maritime. Son bras droit le prit immédiatement dans sa ligne de mire avant de se transformer en une imposante patte de tigre blanc. Le moulinet de sa patte relâcha aussitôt une lame tranchante de Fūton en direction de la grosse poutre qui soutenait la plus grande voile du transport. Cette onde était assez rapide et puissante pour découper le bois de la structure et faire tomber le grand mât sur le pont, qui ne put retenir d'étonnantes vibrations sur tout le navire ; si bien que les marins corrompus et armés, déjà de sortie sur le pont, ne purent retenir pour la plupart une chute imprévue sous le poids de la lourde voile qui leur était tombée dessus.
Après avoir détruit leur principal atout de fuite, Reikan se laissa tomber sur le pont pour avancer au beau milieu de ce dernier, alors que les employés déjà foutus essayaient de se relever. La métamorphe analysa le lieu et la structure du navire pour s'en imprégner au mieux, mais surtout, en vue de repérer le cerveau de toute cette opération de contrebande illégale. Mais ses yeux n'eurent pas le temps de chercher plus loin que la porte de la cabine intérieure s'écrasa sur les lattes de bois, charnières détruites par un puissant coup de pied. Une silhouette s'extirpa de l'obscurité offerte par l'abri du monstre de bois, jusqu'à révéler le fameux Daiki, dont l'expression laissait croire qu'il n'était pas prêt de se laisser faire.
« Daiki, vous êtes fait comme un rat. La Brume a décidé de vous rattraper pour vous mettre derrière les barreaux et vous ne lui échapperez pas. Rendez-vous ou battez-vous sans le moindre espoir, à vos risques et périls. »
Daiki:
récapitulatif:
Santé: Tout roule, encore. Chakra: 2B 4C 1D — La réserve continue de se creuser.
Résumé du tour: Reikan laisse Sabaru attacher l'officier corrompu et se rend à l'extérieur de l'entrepôt pour constater la fuite du navire de Daiki. Grâce à l'aide d'Etsuji, elle prend les devants et détruit le grand mât ennemi pour leur retirer toute chance de s'en tirer, avant de faire face au dirigeant de tout ce réseau, Daiki.
Avec une vivacité déconcertante, un joug de fer vint s’abattre sur la silhouette du corrompu en fuite, le ramenant durement à la réalité ; il ne représentait plus aucune menace pour le trio de la Brume. Aucun de ses comparses, eux-mêmes capturés par la féline le temps des fouilles des deux hommes, ne pourrait s’inquiéter de l’état du hangar… Si toutefois ils faisaient vite. Ses pas le menèrent auprès de ce jeune homme abasourdi par le choc électrique, si bien que le déchaîné se demandait sa la vie l’habitait encore. Les sourcils froncés, Aditya ploya le genou devant lui et glissa la pulpe de ses doigts sur sa gorge, traçant le contour de sa jugulaire avec précision. Il accueilli avec soulagement ces frêles réguliers battements sous sa peau, signe inhérent que ce félon faisait encore du monde des vivants. Sa main revint se poser sur sa cuisse et d’un appui sincère, l’ascèse s’était relevé droitement.
« Tu ne l’as pas tué, rassure-toi. », déclara-t-il sans adresser une œillade à son comparse ; au lieu de cela, il dénicha le carnet de l’un des pans de son kimono afin de le dévoiler à sa vue. « Mieux que ça. Comme il s’agissait de vente et d’achats illégaux… Il était évident qu’une corruption d’une telle ampleur soit organisée, méthodique. Tout est inscrit à l’intérieur ; le nom des acheteurs, celui des fournisseurs, les dates, les prix et bien d’autres choses encore. Ça devrait suffire à déployer la Kenpei sur ces renégats et mettre fin au trafic. »
Ou tout du moins, pour l'instant. La gangrène demeurait enfouie dans le cœur des hommes : gardiens dénaturés n'en avaient été que les jouets et les prétextes. D'autres n'hésiteraient pas à satisfaire ces besoins d'illégalité. Il leur faudrait être prudents.
Ses paroles se stoppèrent sur un regard entendu, alors que Sabaru prenait la tête de leur délégation en s’approchant de la sortie du hangar, un air soucieux peint sur son visage. Si tout avait été déjoué jusqu’à présent… Daiki, la tête pensante de tout cette opération fallacieuse, demeurait encore en liberté ; en le laissant prendre la fuite, tout ce qu’ils auraient accomplis jusque-là aurait été caduc. Le blond ne perdit pas de temps pour adjoindre ses pas à ceux de la féline, replaçant soigneusement ce carnet de toutes les convoitises dans les plis de ses vêtements.
Ce ne fut qu'à l'instant où la lumière du jour s'imposait à nouveau au trio qu'ils purent être témoin du départ précipité de leur cible... dont la coque du bateau venait d'être pourfendue d'un harpon. Surpris, Aditya glissa une œillade à ses coéquipiers : l'accalmie avait remplacé le doute chez le roi sans couronnes, et il se doutait que ce coup du sort y était pour quelque chose. C'était donc ça que tu avais prévu à notre arrivée. Un fin sourire entendu prit place sur ses traits avant qu'il ne s'élance à leur suite : l'occasion était bien trop belle pour les laisser s'échapper ainsi.
Ses semelles quittèrent le doux confort de la terre pour s'écraser sur l'ondulation de la mer, son chakra maintenant avec précision son équilibre au sein de ce déchaînement naturel. Bien vite, sa silhouette fut accueillie par les lames de bois qui tapissaient le navire, où déjà, les matelots s'affairaient à retirer ces crocs de métal. Et alors que la métamorphe s'élançait sur le mât qu trônait en maître sur le pont, Aditya joignit ses paumes sous le signe du serpent avant de s'élancer au travers de la foule, afin d'empêcher quiconque de la suivre dans sa besogne mais également de prévenir certains fuyards qui préféraient l'étau marin à celui des chaînes de la justice. Au rythme de ses coups qui fusaient sur les renégats, son affinité sylvestre se mêlait à ses mouvements, parfois sous la forme de pieux acérés ou d'un bloc téméraire.
Bientôt, le pont fut tapissé de matelots gémissants qui, au même titre que leur capitaine, étaient privés de tout espoir d'échapper à la brume grâce à l’intervention conjointe de l'enfant du bois et de la métamorphe qui avait tôt fait d'éventrer la voile principale. Dès lors que Sabaru les aurait rejoints... ils pourraient débuter l'arrestation de Daiki.
Aditya se redressa à son tour alors que Reikan s'abattait au sol à ses côtés après sa chute, lui accordant un regard entendu alors que le colosse s'extirpait de sa tanière. Les choses sérieuses allaient commencer.
✦ Saisissez-vous de preuves pour les fournir à la Kenpei
La chute du mât, sectionné par Reikan qui avait pris de l'avance sur lui avec Aditya, fit naître un sourire sur les lèvres du Nō, qui courrait à même les flots du port pour rejoindre l'Itsuzai immobilisé. Derrière eux, sur les quais, une foule commençait à s'agglomérer. Marins, marchands, quelques civils et genins perplexes. Daiki était cerné. Sous peu, la police qu'avait alerté Sabaru arriverait; et au vu de la situation, même les éventuels pourris restants seraient de leur côté pour neutraliser celui qui pouvait tous les faire chuter. Ils ne savaient pas encore que les preuves étaient déjà en possession du trio.
Voilà comment le plan qu'avait fomenté Sabaru se déroulait. Le délai qu'il avait imposé à son clone avant de rejoindre le QD du Kenpei s'illustrait là, réduisant les risques d'être pris pour cible par les corrompus au néant puisqu'ils n'auraient pas l'occasion d'agir au nez et à la barbe de tous. S'ils étaient venus au hangar, ils auraient pu prêter main forte à leur cadet et les éliminer proprement. Le trio, par son efficacité, n'aurait pas à se confronter à des agents probablement bien plus forts qu'eux. La ruse avait primé.
Un bond amena Sabaru sur le pont du navire, alors que Daiki se tenait en face de la porte béante de sa cabine personnelle, à quelques mètres de ses deux coéquipiers du jour. Le forban, en croisant le regard du Nō, se mit à sourire. Son hilarité explosa, sous la forme d'un rire à la fois incrédule et sardonique.
« Toi ! Encore toi ?! Hahahahahahaha ! La providence sait donc elle aussi faire preuve d'humour ! »
Ses traits se durcirent brusquement, et un rictus haineux et malveillant déchira ses traits anguleux. Une véritable aura menaçante émana de Daiki, invisible et insidieuse, s'infiltrant de force dans l'esprit de chaque personne présente sur le pont. Une caresse glacée longea l'échine du genin, irrémédiablement intimidé, bien qu'il se soit évertué à le cacher.
« N'est-ce pas, Nō Sabaru ? »
Sur ces mots, il leva son sabre devant sa bouche, pour y exhaler une étrange nappe chakratique translucide aux reflets verdâtres qui épousa la forme de la lame. Du... Fuuton ? Eh merde, grommela-t-il dans sa barbe. L'instant d'après, le capitaine se mit à attaquer...
... et tout le monde en aurait pour son grade. Peut-être avait-il viré fou à cause de la situation. Tout indiquait qu'il serait tôt ou tard vaincu, qu'importe l'issue de son affrontement face aux trois genins. Pour autant, Daiki ne se priva pas de faire pleuvoir sur tous les passagers de son Itsuzai une pluie de lames éthérées, tranchant même ses hommes de main sans pitié. Le sang jaillit de toutes parts, tapissant le pont qui était lui aussi mis à l'épreuve par les projectiles effilés. Pour sa part, le Nō avait laissé libre court à la rage de sa tempête de mailles, déchirant les assauts de son assaillant à mesure qu'ils se confrontaient à ses liens en furie.
En couplant son étrange aura passagère et la cohue provoquée par ce capharnaüm, Daiki put enchaîner directement sur une série de signes, après avoir glissé la lame de son épée en travers de sa bouche pour libérer ses mains. Un grand fumigène jaillit de sa position, et une ombre pesante surplomba l'Itsuzai immobilisé. L'instant d'après, le bateau était tout bonnement déchiré en deux par la chute d'un énorme corps indiscernable, juste en face du trio. Le maître des liens bondit, quittant le navire qui rejoignait les abysses du port, pour se reposer sur les flots quelques mètres plus loin.
L'ombre qui avait sectionné l'Itsuzai en deux réapparut, sous leurs pieds cette fois. Elle s'éloigna, mouvante, avant d'approcher de la surface... pour révéler le dos d'une baleine, qui exhala un jet d'écume de son évent avant de plonger à nouveau. Il n'y avait plus la moindre ombre de Daiki dans la zone du naufrage. La pièce tomba assez vite, pour Sabaru.
« Cette baleine ne doit pas s'échapper ! Il s'agit d'une technique d'invocation ! »
De sa dextre, il pointa l'énorme mammifère marin. Une chaîne quitta sa manche, pour s'écraser dans les flots en les déchirant comme l'aurait fait une ancre larguée. Le lien finit sa course en s'attachant à la nageoire caudale de la bête, pour tenter de la gêner, et surtout pour l'empêcher de se volatiliser. Entraîné dans son élan, le genin ne put qu'opposer son poids, sa force et celle de ses chaînes pour forcer un ralentissement minime de la baleine. Ses semelles, revêtues de chakra, fendaient les flots en deux à mesure qu'il s'y appuyait.
Faute de mieux, le genin lança un coup d'oeil à ses comparses. Sentant ses forces décliner, il misa le tout sur Reikan et Aditya. S'ils échouaient, il avait encore une botte secrète — comme à son habitude —; le seul soucis étant qu'elle lui serait très coûteuse.
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