Chacun son tour, chacun son moment de faiblesse. De gré ou de force, puisque c'était ainsi qu'ils étaient partis, c'était ainsi qu'ils s'étaient rencontrés en alliant férocité et complicité, ils ne formaient et ne formeraient probablement jamais un couple. Ils étaient shinobis et non civils, la guerre, la violence et l'envie de sang nourrissant l'esprit de Jun, autant que parfois les comportements sauvages du grand rouquin. Ils n'étaient pas l'archétype des recrues Kumojins, sortant sans trop forcer des clichés généraux. Elle avec son masque et son regard mauvais, une drôle d'aura émanant à chacun de ses pas, elle empestait la mort et les idées sombres, un simple aperçu, une erreur de trop et le regard croisant les deux rubis de la masquée foudroyait les impudents. Sa démarche ne laissant guère d'occasion d'interrompre sa course, effrénée vers une destination encore inconnue. Car comme la plupart des relations à base d'affrontement, et avec une envie de prendre le dessus sur l'autre, rapidement chacun mettait des as dans sa manche. Et aujourd'hui c'était Jun, sobre qui prendrait les devants, était-ce l'âge? Ou bien la dernière mission, le combat contre un nécromant qui poussait désormais Jun à prendre le taureau par les cornes. Une chose était néanmoins certaine, depuis son arrivée à Kumo quelque chose en elle s'était cassée.
Il était facile de se fondre dans la masse d'aspirants, de shinobis s'entraînant régulièrement le plus souvent en coopération, pour progresser et atteindre les sommets. Mais la dépendance, et une forte envie de solitude préservaient à la plus grande joie de l'errante, l'envie de copier leurs comportements. Seule elle s'était construite, seule elle avait survécu et désormais elle le sentait, seule elle continuerait à vivre. Néanmoins être seule ne fermait pas les portes à une relation particulière, car comme les pays se fermant au monde il fallait tout de même des relations commerciales. Une ouverture sur le monde même infime, ne voyant l'extérieur qu'au travers d'un judas. Mais c'était déjà amplement suffisant, et désormais en hauteur, crapahutant sur les toits comme la plupart des shinobis, elle avait suivit les déplacements du manieur de limaille et aujourd'hui elle se montrerait à l'improviste car il ne l'attendait pas, et comme dans ses contrats elle aimait surprendre ses victimes au dépourvus, après tout n'était-ce pas le principe de sa branche de métier?
Aujourd'hui pourtant, sa liberté était entravée et Kei l'aidait à passer le temps. Et aujourd'hui, elle s'ennuyait et ils s'étaient chacun promis mutuellement de se retrouver de nouveau, qui sait si aujourd'hui ils ne détruiraient pas une partie du village, la destruction, le chaos c'était ainsi que se sentait vivante Jun. Des pulsions qui feraient pâlir les religieux, reprouvant la morale pour profiter de la vie comme elle l'entendait, et qu'importe les jugements, les rumeurs et si quelqu'un désapprouvait ou souhaitait la faire changer de comportement. Libre, était née Jun parmi la violence de ce monde, sans aide avait-elle grandie alors aujourd'hui personne ne lui imposerait un code de conduite. Se faufilant par la fenêtre, Kei arriverait prochainement elle décida de l'attendre devant sa porte. Après tout un crime était un crime, et entrer par effraction chez le rouquin ne l'intéressait guère, elle rentrerait dans son monde comme il avait chez elle. Et ils seraient quitte. C'était une bonne journée, sortant de sa poche une flasque d'alcool de basse qualité, ouvrant son masque et y vidant une partie avant de tousser et de sentir sa gorge se réchauffer, comme ses entrailles.
L'errante entendit des bruits de pas, et lorsque la figure de Kei se dessina enfin et avant qu'il ne puisse réagir elle se rapprocha de lui le jaugeant malgré la différence de taille notable entre les deux. Avant d'hausser les épaules et de provoquer comme à son habitude.
-Il est si facile de te cambrioler, je me suis dit que j'allais monter la garde.
De retour d'une courte mission à la touche de nécromancie, Kei reprenait sa vieille routine. Entraînement, source chaude, dodo. Aucun contrat, pas d'équipe, la solitude le reprenait dans un jeu fermé. Personne l'accompagnait dans ses démarches, préférant conserver ses temps libres pour lui-même et à l'amélioration de ses techniques. Ce dernier combat avait prouvé ses points faibles et la nouvelle force de son sable noire. Puis, ce combat avait aussi fait naître une admiration en or face à la masquée. Il entendait encore ses cris et son excitation face au prisonnier. Elle représentait un exemple à suivre, mais il notait le danger et le chemin qu'elle osait prendre. Ses futurs choix allaient-ils l'éloigner de cette kunoichi ? Elle ne désirait pas rester, il le savait parfaitement. Lui ? et bien, la bête en cage commençait à s'endormir. Keikaimushō, son nouvel objectif. Une unité qu'il priorisait et qu'il considérait comme sa meilleure option pour devenir un shinobi puissant dans les rangs du village caché des nuages. Un détail le chicotait. Son obsession ou simplement, ses sentiments, ne cessaient de grandir. Joo Jun ne quittait plus son esprit. Avant de quitter pour la forêt, une conversation avec Shin avait été partagée. Il se souvenait de ses propos: la kunoichi que je courtise n'a rien de commun. Il confirmait vouloir un lien plus étroit avec la jeune femme. Déjà sienne, le rouquin en voulait plus. Serait-ce possible ?
Sur le chemin jusqu'à chez lui, Kei se sentait observé. Rien de remarquable, les gens le regardaient souvent pour son apparence de colosse. Pourtant, cette impression le suivit sans arrêt, le rendant encore un peu paranoïaque. À sa porte, la masquée se tenait droite avec son classique regard perçant. Kei se doutait que ce jour allât arriver où elle le suivrait. Ça ne le dérangeait pas, elle avait probablement remarqué à quel point sa journée était vide et ennuyante.
« Je n'ai rien de précieux. » sauf toi. « ni de petits secrets. » contrairement à toi.
Le géant s'approcha à son tour et regarda les alentours. Personne. Il retira rapidement le masque de son interlocutrice et plaqua sa bouche contre la sienne. Le goût de l'alcool le fit saliver. Elle commençait déjà à boire ? Comme si ça l'étonnait. Il se sépara de son corps après quelques secondes à utiliser sa langue. Contrairement à elle, son appartement ne tenait pas sur plusieurs étages à grimper, un seul escalier et hop, l'accès à sa porte était dégagé. Puis l'intérieur gagnait facilement la compétition. Aucune saleté, un sol propre et sans bouteille, un lit fait.. Kei aimait que tout soit en ordre. Il fit signe à Jun de le suivre à l'intérieur.
« C'était amusant me stalker ? »
Kei se moquait avec joie. Il fit quelques pas sous son toit et remarqua aussitôt la pile de livres sur sa table de nuit. Des bouquins sur Kaze no Kuni, les familles du désert et un dossier sur l'unité de Keikaimushō. Il les prit rapidement et les poussa au fond de son tiroir en le fermant brusquement. Tout pour ne pas attirer l'attention. Avec Jun, il n'avait pas partager de détails sur sa vie. D'ailleurs, il ne connaissait toujours rien d'elle et de son passé. Peut-être était-ce mieux ainsi de rester dans le mystère. Le Kumojin avança vers la jeune femme et la souleva dans ses bras, bloquant ses jambes autour de sa taille. Il alla s'asseoir sur son lit, beaucoup plus imposant et fait à sa taille de géant.
« Tu voulais me parler ou tu t'ennuyais ? » dit-il en refermant ses mains sur ses fesses.
Il prenait de nouveau les devants, visiblement la présence de l'errante lui plaisait. En témoignait l'engouement que mettait Kei en sa présence. Savourant le contact, le souffle rauque de l'homme, le passage de sa langue de sa bouche. Ils s'embrassaient comme les jeunes adolescents, y mettant autant d'intensité que d'envie. Et aussi intense qu'était cette embrassade, Kei se retira pour inviter Jun à le suivre dans son humble demeure. Que cachait-il donc? Que renfermait les tiroirs d'un géant maniant la limaille de fer? Après tout, dans le domicile de la masquée, son compagnon ne s'était pas gêné pour fouiller et découvrir chaque parcelle de l'appartement. Alors une fois le loup dans la bergerie, il était trop tard pour se plaindre. Des réponses elle en aurait, car comme depuis le début de leurs relations particulière, chacun obtenait plus ou moins ce qu'il souhaitait de l'autre. Les contreparties en revanche changeaient en fonction des rencontres, la dernière fois ils avaient combattus ensemble un nécromant, divergeant sur la manière de procéder. Kei semblait se soucier des enfants, des vies humaines tandis que Jun se moquait éperdument des dommages collatéraux, préférant le feu des combats au secours des plus faibles.
-Tu te doutais, qu'un jour, je te rendrai la monnaie de la pièce. Après tout, tu ne m'as pas invitée comme un galant personnage, n'est-il pas normal dès lors que je m'invite toute seule?
Des bouquins, Kei lisait-il? Une facette de l'homme que ne connaissait pas Jun, elle ne savait en vérité pas grand chose de lui, et c'était pire de son côté. Sans entraves, sans passé à raconter ils avaient déjà établit une sorte de lien fort. L'inconnu se mélangeant avec une impression de connaître pourtant le comportement de chacun, sans être brider par un jugement quelconque sur le passé des deux shinobis. Lorsque le géant décida de nouveau de trimbaler l'errante comme une poupée de cire, Jun passa ses bras autour du cou de son compagnon, plongeant ses iris couleur rubis dans le regard du Yoshino. Il savait très bien pourquoi était venue Jun, ils savaient tout deux qu'ils étaient prédestinés à se revoir, mais aucun ne l'avouerait sans remettre en cause les sentiments de l'autre. L'égo des deux êtres étant probablement autant disproportionné que déplacé, mais c'était aussi les dessous de l'affaire. Refuser d'établir un semblant de vérité en sachant plus ou moins ce que pensait l'autre. Il n'avait rien de précieux? Et pas de petits secrets? Oh le vilain menteur, mentir était pourtant l'apanage des guerriers, manier la vérité à convenance.
-Et que viens-tu de ranger brusquement, si ce n'est des choses précieuses et secrètes?
Tapotant le torse du géant s'installant plus confortablement sur le lit, passant une jambe puis l'autre, enfourchant Kei comme un cheval. Il était pourtant évident que la taille de Kei accentuait l'impression qu'il dégageait. Le lit semblait plus imposant que nécessaire, s'adaptant pourtant à la condition physique de son propriétaire. Et lorsque les mains baladeuses trouvèrent une destination qu'elles ne connaissaient que trop bien, Jun sans son masque sentit ses joues rougirent et la chaleur envahir sa gorge. Sortant avec une main, la flasque d'alcool de sa poche, tentant de finir le contenu le plus rapidement possible. Dans certaines contrées, les guerriers buvaient pour se donner du courage, de la force pour oublier la triste réalité et la mort qui attendait chacun au tournant. Présentement Jun buvait pour soutenir une conversation, pour aller au delà d'une simple nuit chaude. Car si ils y viendraient, probablement, visiblement ce ne serait pas sans discuter.
-Te parler? Sais-tu converser, visiblement je déduit avec les livres que tu sais également lire. Grande découverte, m'ennuyer? Oh Kei, je pensais que tu me connaissais un peu, je ne m'ennuie jamais disons néanmoins qu'aujourd'hui j'ai jeté mon dévolu sur ta personne.
Jun mentait, et Kei devinerait aisément, la voix changeante de l'errante perdant de sa froideur pour y trouver la force de mentir malgré la sincérité évidente de ses actes physiques. Une main contre le torse du géant, l'autre allumant une cigarette avant de traverser la chevelure rousse du guerrier de fer. Maintenant que les choses étaient plus ou moins misent au clair, il était temps comme toujours de détourner l'attention de l'autre, de riposter et de ne jamais baisser sa garde. Et qu'importe si comme contre le nécromant, certains y laissaient des plumes. Qu'il était excitant de mélanger adrénaline, sensations fortes et violence.
-Je dois dire que même si tu sembles préférer les enfants au combat, tu n'es pas mauvais Yoshino.
« Je n'invite personne chez moi. Mais j'ai penser à toi régulièrement, je ne savais pas comment te guider jusqu'ici. Au final, je n'avais rien à faire, tu es venue sans invitation. »
Il ricanait en rangeant rapidement ses petites cachotteries. Il espérait éviter la conversation sur ce sujet, mais il ne pouvait rien attendre avec Jun. Les deux partageaient étroitement les désirs de l'autre, respectant mutuellement les demande. Si elle lui posait des questions, il s'ouvrirai du mieux qu'il pouvait. Kei ne se considérait pas accessible, mais mentir à sa belle kunoichi ne le tentait pas. D'ailleurs, il ne refuserait pas des informations sur elle aussi. Son imagination créa l'image d'une petite fille à la chevelure blanche, tournesol à la main et petit chapeau contre le soleil. Peut-être deux parents derrière, sans soeur, ni frère. Une petite peste qu'elle devait être dans ses jeunes années. L'image disparu rapidement pour remplacer la Jun actuelle, dans ses bras. Il adorait la trimbaler telle une poupée.
« Si tu veux tout savoir, ce sont des bouquins sur le pays du vent, mon pays natal. »
Ça expliquait pourquoi il supportait la chaleur sans problème. Posséder un manteau en grosse fourrure, même à Kumo, c'est un peu étrange. À l'inverse, le colosse déteste le froid et ne peut pas passer une nuit sans couverture. Dans ses voyages, il ne tentait jamais les terrains frisquets. Le soleil de Kaze lui manquait parfois, mais la chaleur que dégage Jun lui rappelait de joyeux souvenirs. La masquée était parfaite pour lui. Dans ses bras, elle le complétait comme une pièce de puzzle. Et même dans les moments les plus intime, lorsqu'ils ne formaient qu'un, ils se complétaient à la perfection. Encore une fois, mais cette fois-ci sur son lit, Kei explora les formes de son interlocutrice. Il riait à la vue des joues rouges et à l'apparition d'alcool. Avait-elle donc toujours besoin de liquide pour tenir une soirée complète avec lui ? Après une journée à s'entraîner, le géant ne toucherait pas l'alcool avant quelques heures, mais si sa partenaire voulait tomber dans une spirale de plaisir, pourquoi pas. Sa voix peut assurée lui confirmait qu'elle ne savait pas toujours mentir. En fait, dès qu'elle tentait de fausser la vérité, c'était si simple à deviner.
« Ah ouais, je te crois princesse. »
Son sourire ne le quittait pas. Si Jun venait à sa porte, il lui donnerait tout ce qu'elle veut. Lui aussi partageait ce même sentiment, brûlant son intérieur et presque hallucinant pour la tête. Se contrôler devenait si difficile soudainement. La main qui parcourut sa chevelure de feu le fit frémir. Même l'odeur ignoble de la cigarette ne lui déplaisait plus. Son corps bougeait au même rythme qu'elle lui offrait. Ses lèvres restèrent en retrait, ne pouvant pas avoir accès à sa bouche. Ses mains s'occupèrent au bas de son corps, se reposant après une journée si longue et ennuyeuse. Le Shinobi trouva une position plus confortable en laissant son dos toucher le matelas. Contrairement à l'autre nuit, son cerveau ne s'endormait pas, il profitait avant le spectacle. Calme dans sa bulle de caresse, Kei s'étonna d'avoir un retour sur la mission.
« Je voulais réussir la mission à la perfection, donc sauver tous les enfants et neutraliser le prisonnier. J'en ai rien à faire des gamins. Tu étais très élégantes au combat. Si un jour une grande guerre se déclenche, je te veux avec moi. »
Un nouveau mensonge s'installa. Inconsciemment, protéger un humain sensible et faible devenait important pour lui à la seconde même où il apercevait qu'une situation devenait hors de contrôle. Il ne le ressentait pas, mais il agissait. Peut-être que ce trait faisait de lui un shinobi plus juste. Jun, au contraire de lui, était prête à les abandonner sous une tonne de pierre. Un sort cruel pour de si jeunes vies. Face à Joo, avouer vouloir défendre les plus faibles serait complètement fou. Puis, il n'avait pas à le dire: pendant le combat, ses rubis avaient eu le temps de l'observer dans ses gestes. Elle commençait peu à peu à percer sa vraie nature. Une facette que lui-même ne reconnaissait pas. S'il décidait de se poser les bonnes questions, les réponses seraient évidentes. Kei refusait de voir un autre être subir le même chemin que lui.
Collé à Jun, ses intentions devenaient de plus en plus claires. Kei souriait toujours et encore. Le souhait de l'embêter le poussait à bout. Ce serait impossible pour lui de passer à l'acte sans traîner du pas pour ralentir sa proie.
-Kei, Kei, Kei tu parles beaucoup hélas j'ai bien peur que tes véritables intentions te trahissent.
Elle passa la main dans la chevelure rousse de l'homme, son regard se posant sur le sien puis sur son corps immense. Elle ne l'avait jamais vu comme ça, sous cet angle, le grand gaillard cachait-il autre chose derrière son armure humaine? Dans ces rencontres, dans les échanges des deux shinobis, toujours résidait une envie, une pulsion de domination. Prendre l'ascendant sur l'autre, ne jamais avouer véritablement ses intentions tout en devinant celle des autres, c'était ainsi un jeu perpétuel ne semblant jamais prendre fin. Mais aujourd'hui, chez Kei, l'errante decelait quelque chose d'autre. Humant l'air, respirant son odeur comme décelaient les prédateurs chez leurs proies des pulsions primaires. L'Homme mentait, il déviait le sujet de conversation, semblant bomber le torse pour quelconque raison. Qui était-il vraiment, elle l'avait vu de ses propres yeux, son côté sombre, la violence enfouie dans le corps du géant à la chevelure rousse. Et pourtant face à elle, ouvertement il semblait paraître piètre menteur. Son passé intéressait peu l'errante, préférant se concentrer sur l'être qu'était désormais le Yoshino. Pourquoi cherchait-il à rendre cette relation, ces échanges normaux? S'était-elle méprit sur son compte?
-Si nous mentons Kei, tâchons de bien le faire. Tu as porté les gamins, tu n'approuvais pas mon comportement initial, se pourrait-il que sous cette apparence rugueuse se cache en vérité un délicieux fondant au chocolat? Si la guerre se déclenche Kei, que choisiras-tu entre les faibles et moi?
Son regard devenait mauvais, une parodie de sourire malsain s'étirant sur son visage, dévoilant sa dentition taillée. Il devrait faire un choix, Jun l'avait déjà fait depuis un moment, les faibles n'auraient rien d'autre que son méprit et qu'importe si le rouquin désapprouvait, finalement ils divergeaient d'opinions sur plusieurs sujets. Chacun ses secrets, Kei voulait les percer, soit Jun jouerait comme à son habitude franc jeu, passant une main dans la chevelure du rouquin l'attirant près de sa gueule. Serrant la tignasse, fixant le mur derrière son corps ses iris rubis s'embrasant.
-Si la guerre se déclenche Kei, je n'hésiterai pas une seconde à assouvir mes pulsions. Que tu réprimes ce que j'ai vu chez moi, je peux le comprendre. Mais tu ne peux pas jouer sur tous les tableaux.
Passant sa gueule contre la sienne, son corps semblant subitement se réchauffer. Tout ça l'excitait, jouer les mauvais garçons pour découvrir une autre facette, Jun aimait volontiers laisser le grand gaillard prendre le dessus sur elle car ils toléraient tous deux les règles du jeu. Mais le sérieux de la conversation imposait toute autre rigueur, il fallait certainement plus de courage d'assumer volontiers sa position que d'adapter son discours. Mais comment lui en vouloir? Dans le fond Kei semblait être un faux méchant, le lien les unissant résidait en partie sur ça, lui savait la dompter mais comme tous les animaux sauvages, à tout moment la bestialité pouvait reprendre le dessus.
-Je ne viens de nul part Yoshino, ni du pays du vent ni d'aucunes contrées aussi loin que je m'en souvienne. Mes premiers souvenirs sont ceux de mes premiers meurtres, ensuite j'ai erré de contrées en contrées, tuant pour vivre. Mais si tu veux savoir mes origines, connaître une éventuel histoire j'en ai guère à offrir. Et tu sais quoi? C'est encore mieux.
La folie dansait dans le regard de l'errante, rapprochant encore son corps le recroquevillant contre celui du géant. Son discours paradoxale, c'était peut être cette dualité qui avait poussée Jun à le suivre, à tenter de découvrir et de prendre le dessus sur ses terres. Les cicatrices sur le corps de l'errante, chaque trace était d'autant une preuve que le passé ne servait à rien, des preuves de sa survie et sa valeur.
-Je me concentre sur l'instant présent, le passé peut être remanier Kei, être déformé alors que l'avenir demande un cran supplémentaire. Il est facile de pleurer sur son sort, sur les malheurs que chacun a vécu, il faut de la folie et une furieuse envie de survivre pour affronter demain sans craindre que les ombres de ta vie d'avant te hantent.
Une main sur le visage du Yoshino caressant doucement les joues de son amant, ils n'étaient pas du même monde, leurs mondes se rejoignant sur une frontière fine que chacun pouvait franchir. Cela dépendait de la situation, Jun ne voulait pas exclure le grand rouquin de sa vie, il était intéressant et méritait encore son attention.
-Si d'aventures tu veux retourner dans ton pays, peut-être que j'irai avec toi. Je me demande si les sableux saignent comme les autres.
Il fallait en rajouter, ne pas laisser des sentiments et émotions prendre le dessus. Et de nouveau ses dents avec passion laissèrent une trace sur le cou du manieur de limaille.
-Mais si tu veux savoir, je considère que tu es dans mon présent.