Est-ce que ce quotidien la changeait ? Ironiquement oui.
Quitter le domaine clanique ou la bibliothèque, même pour mener un travail presque similaire toujours au sein de la cité apportait malgré tout quelques nuances qui ne la laissaient pas insensibles. Takara avait besoin de changer d'atmosphère, même d'infimes variations faisaient parfois la différence pour regagner son calme. Le clan peinait à redresser la barre faute à un moral gravement entamé et un nombre conséquent de pertes. Cela contribuait à une certaine lourdeur dans les locaux. La trentenaire elle, faisait son possible, y restant imperméable du mieux possible et tâchant d'apporter quelques touches d’allégresse ici et là, mais au fond malgré son influence montante elle perdait du terrain plus qu'elle n'en gagnait, à trop partager les préoccupations des autres.

Aussi œuvrer ailleurs lui redonnait du baume au cœur. Après tout, si elle était restée ici c'était bien pour venir en aide au peuple, pas seulement son clan. Aux victimes de la guerre et de l'après guerre. Il y avait encore des entêtés. Autant les shinobi étaient soit résignés soit dores et déjà partis, autant il ne fallait pas sous-estimer la hargne latente de certains civils qui, non content d'être faibles, ne se privaient pas toujours de mettre les pieds dans le plat. Par le nombre, par le désordre, par des astuces, certains redoublaient d'efforts dans le simple but de déstabiliser le nouveau pouvoir encore administrativement fragile. Evidemment, il y avait tout de même eu des réponses. Même si l'Empire s'était montré clément, il y avait tout de même des échos d’exécution.

Mais le sujet d'aujourd'hui n'était autre qu'un quartier populaire dont l'absence d’hôpital représentait un problème on ne peut plus concret, indépendamment des luttes ou réticences quelconques.

La Suzuri avait été dépêchée pour intervenir sur les lieux. Apparemment la zone était encore sujette au trouble, à son plus grand regret. Ne partageant de base pas le patriotisme propre aux shinobi, elle s'étonnait même d'apprendre que des civils se refusaient à l'idée de voir le drapeau de la cité remplacé par un autre. Des entêtés. Elle ne faisait pas parti de ceux qui imposent l'ordre, ne travaillait pas pour Teikoku. Elle avait promis à un de leur lieutenant un savoir vivre, une coopération cordiale, pas de réprimer des actions de colère de qui que ce soit hormis peut-être les véritables guerriers qui avaient déserté, s'ils se décidaient à revenir. Il y avait le temps pour cela. Et elle n'avait pas hâte. Participer à ce genre de conflits ne lui plaisait guère... Elle qui avait déjà accepté la disparition de l'entité nommé Kumogakure.

Elle se confronterait toutefois à de la résistance, ne serait-ce que par les mots. Cela pouvait être plus compliqué que prévu. Son discours quand bien même sincère et réfléchi rentrait dans l'ordre établi par l'Empire, et si cela pouvait déplaire certains civils, il serait d'autant plus délicat de les convaincre s'ils faisaient partis de ceux qui voyaient déjà d'un mauvais œil le clan Suzuri avant que cette annexion ne se produise.
La trentenaire le voyait venir gros comme une maison.
Pour que des habitants s'obstinent tant à défendre Kumogakure, ça ne devait pas être des flèches. Il y avait une partie partie de la population assurément dévote à l'égard du système shinobi, c'était eux qui créaient le trouble, et c'était également eux qui à une époque pas si lointaine condamnaient les shinobi eux mêmes qui ne se comportaient pas assez bien à leur goût. Le clan Suzuri en avait fait les frais. Jusqu'à l'Ogura, triste Ogura.

Simplement habillée, comme d'habitude, sans aucun bandeau, elle se déplaçait donc vers le quartier concerné. Tant pis s'il y avait de la résistance, elle préférait s'expliquer en face plutôt que de jouer un rôle. L'honnêteté payait toujours. Et même les plus réticents pouvaient trouver des intérêts en faisant profil bas.
Il était temps de prendre la température.