· Cimetière — Kumogakure no sato · 雲隠れの里 — Village caché par les nuages · Si la flamme de mon cœur était encore en mesure de vaciller, il était certain que je ferais tout pour accomplir un idéal, qui pour moi, devait être le futur de Kumo d’une façon où d’une autre. Je ne cessais de repenser à ma discussion avec Yūga, un ami de jeunesse de mon frère Shikarai. Il avait dans son cœur, certainement tout comme moi, de la haine. Nonobstant ce qui pouvait nous rassembler, il y avait un gouffre abyssal entre nous ; reposant principalement sur notre façon de concevoir le monde. Il en découlait indéniablement que nous n’avions pas le même avis sur Kumo. Lui était fier des Kages que nous avions connu, ce n’était pas mon cas. Le premier du nom c’était contenté de salir le nom de mon clan, les deux suivants avaient conduit les Kumojins à leur perte, entrainant le pays de la Foudre à sa perte. Pour moi cette faillite venait du fossé entre le Kage et le Seigneur, et prouvait que cette dualité n’était pas bonne pour un pays. Il suffisait de regarder attentivement les autres pays pour le comprendre. Kiri, le premier village caché y posséder un Kage, n’avait connu la stabilité que par court moment, le poste de l’ombre ayant de changer d’incarnation au grès des vents. D’un autre côté à Iwa, la stabilité semblait belle et bien régner, mais à quel prix. Pour Yūga, je trahissais Kumo. Seulement pour moi, c’était tout le contraire. Rejoindre l’empire était peut-être la seule chance pour Kumo et la Foudre d’exister. Reprendre le pays ne conduirait à rien si c’était pour ne tirer aucune leçon du passé. J’étais content d’avoir pu arracher Kahei à tout cela pour le conduire en sureté alors qu’il servait de cobaye pour d’abominables expériences.
Tels étaient bien toutes les raisons de ma présence en ce lieu funeste : le cimetière de Kumo. Drôle d’endroit pour donner rendez-vous à quelqu’un. Toutefois, en plus de la discrétion qu’il permettait en se cachant dans un mausolée, il faisait aussi acte d’un symbole fort. J’avais il y a quelques semaines, comme tout le monde dans la ville, porté mon attention sur des tracts étranges. Un ingénieux jeu de piste qui n’avait qu’un but. La formation d’un groupe de rebelle au sein de Kumo, en vue d’un soulèvement. Profitant de ma position de soldat pour brouiller les pistes, j’avais pris contact avec les rebelles dans l’idée de les infiltrer. Je n’y étais pas encore parvenu, mais j’avais réussi à réunir les conditions pour être en passe d’y arriver, même s’il allait que j’exécute une mission pour prouver mon engagement. Bien qu’il soit bon de prendre des initiatives, c’est aussi très dangereux dans ce genre de situation, et j’avais pris mes précautions. Dans cette optique, j’avais dès mon premier rendez-vous avec la résistance, pris soin d’écrire un courrier en plusieurs exemplaires, faisant part de mes intentions. J’en avais donné les premiers exemplaires à des dignitaires de mon clan en qui j’avais entière confiance. La dernière était scellée, et destinée à la personne qui serait nommé par l’empereur du feu. De nature méfiante comme me l’avait appris mon frère, j’avais décidé d’envoyer une seconde lettre peu après à cette même personne : Hokazuka Rie.
Hélas, ma qualité de simple soldat me rendait probablement assez peu intéressant, et j’espérais que l’intérêt pour l’opportunité que j’offrais, serait prise en compte. Il le fallait. C’était sans doute très prétentieux de ma part, mais j’avais requis la présence de la régente et d’elle seule – ce qui en plus de pouvoir être vu comme un affront pouvait aussi être vu comme une menace. Cependant, c’était un risque à courir. Je ne pouvais pas me permettre d’être démasqué en tant qu’infiltrer, avant même de l’avoir été. Et moins de gens serait au courant de ma position, mieux serait gardé le secret. J’allais bientôt savoir si j’avais bien fait, puisque je sentis une présence s’avancer dans le mausolée, je sortis de l’ombre dans laquelle je me trouvais pour faire face à mon interlocutrice.
— Je suis vraiment honoré que vous ayez accepté de vous déplacer, dis-je en m’inclinant pour la saluer. Je sais bien qu’une telle requête de la part d’un simple soldat comme moi doit plus encombrer votre emplois du temps déjà chargé alors je tâcherais de faire le plus rapidement possible.
Ayant peur de paraitre prétentieux, j’avais préféré prendre l’un de mes tons monocorde et monotone favori.
— Si vous jugez que mon acte est une traitrise, je vous laisse agir en conséquence.
Ton ombre te précédait ; Ton interlocuteur t'avais salué avant même que ton corps n'apparaisse sous son regard. Il devait être vigilant, dans l'attente de ton apparition. Tu avais lu quelques heures plus tôt sa requête quant à une rencontre « privée » mais dans un lieu déserté... du moins par les vivants. Si le contenu de la lettre paraissait urgent, sa forme avait cependant levé quelques doutes quant aux raisons qui justifieraient ta venue en solitaire.
Tu ne pouvais pas te permettre de te plonger la tête la première dans un traquenard ; mais tu ne pouvais pas non plus ignorer cette révélation. Ce garçon était potentiellement le début de fil qui te mènerait jusqu'au nœud principal de la révolte muette.
Des tracts avaient fleuris sur les terres de Kumo, des poèmes engagés qui appelaient clairement à un regard sévère sur l'arrivée de l'Empire au pouvoir ; un appel à la révolte. Mais cette révolte devait s'organiser, fonder des bases... recruter des candidats potentiels. Et c'était le contexte qui avait appelé ta curiosité ; Le Nara s'était exprimé sur le fait qu'il avait été en contact avec les sphères de l'ombre. S'il disait vrai, il serait un allié et un atout de force pour avoir un tour d'avance sur l'ennemi qui grandissait en silence.
Le plus dur du combat restait à venir.
- Je te jugerai traître le jour où tes actes auront des conséquences néfastes sur la population ; qu'elle soit Hijine ou Kaminarijine....
Une mise en garde : un rappel de ton unique rôle ici. Médiation et tempérance. Une balance à équilibrer jour et nuit ; mais pour laquelle tu devais d'office montrer une stature impartiale et engagée.
Néanmoins, il semblait seul ; déterminé et plié aux règles, parlant même d'être puni alors qu'il s'était présenté d'office en aide. Ce n'était pas assez pour te faire baisser ta garde ; il était peut-être un envoyé de la révolte, destiné à brouiller les pistes ; à t'empêcher de voir clair dans leur jeu.
- ... Je t'écoute, Shikarin, dis moi ce que tu penses avoir découvert sur les non-dits ; sur cet appel à la révolte
Tes yeux brillent alors de leur reflet ambrés; dans la pénombre des murs damnés, deux perles de sang attendaient avec appétit les réponses du Soldat.
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Les premiers mots de mon interlocutrice me rassuraient quant à ses intentions. Je m’inclinais alors de nouveau quelques instants en signe de déférence.
– Merci de prendre le temps de m’écouter, je sais que le temps est bien précieux en ce moment. Je ne vous apprendrais sans doute rien en vous indiquant qu’ils sont déjà plutôt organisés. Je ne sais malheureusement guère de choses sur eux pour le moment. Comme je vous l’expliquais de façon succincte dans mon message, j’ai décrypté le message présent sur les tracts, et j’en ai profité pour me rendre au rendez-vous auquel conviait celui-ci. J’ai rapidement été isolé avec quelqu’un qui m’a interrogé pour me jauger et connaître mes intentions. Il s’agissait d’une jeune femme, seule, probablement dans mes âges, mais masquée. Je suppose que si je venais à entendre sa voix je serais en mesure de la reconnaître.
Je pris une pause dans mon récit. Après tout, mon interlocutrice aurait peut-être des questions à me poser, et dans tous les cas, même si je lui avais déjà donné une partie des informations par écrit, il fallait tout de même les digérer.
– Elle m’a posé des questions. Si j’étais bien devant elle pour rejoindre la rébellion, mes intentions et mes motivations en somme. J’ai joué à moitié franc jeu, en mélangeant mon opinion réel et le mensonge tout en m’insurgeant pour paraître le plus crédible et sincère possible et pour faire monter mon pouls, pour ne pas rendre décelable les moments de mensonge. J’ai prétendu vouloir détruire l’empire de l’intérieur. La seule vérité, c’est que je ne crois pas en l’avenir du système des villages cachés. Les défaillances qu’a connu ce système, tant ici, qu’ailleurs, l’opprobre jeté sur mon clan, le massacre de gens innocent a achevé de me convaincre. Soyons pragmatique, même si c’est terrible de l’admettre, le bain de sang qui a eu lieu à Kumo n’a rien de comparable à celui qui a eu lieu à Hi et les insurrectionnaires ne s’en rendent compte. C’est pourquoi je préfère donner mon allégeance à l’Empire, à un nouveau système, de toute façon la vengeance n’apportera rien que la mort de mes concitoyens de Kaminari ou de Hi, et je ne le souhaite pas.
Contrairement à mon discours face à l’émissaire de la rébellion, il n’y avait guère de calculs derrières mes mots.
— Elle m’a ensuite logiquement demandé jusqu’où j’étais prêt à aller. Je peux vous répéter de façon exacte et sincère ce que je lui ai dit à savoir que… Je suis prêt à mourir pour que Kumo soit de nouveau libre. En revanche, je ne suis pas suicidaire, si je meurs, je veux que cette mort soit utile à la cause que je défends. Si je dois mourir pour ne pas révéler des secrets, ou pour défendre jusqu’au bout un allié, ça ne me gêne pas. Si je dois tuer, qu’un qui était naguère un compagnon d’arme, mais qui défend une cause qui ne peut coexister avec la mienne, alors je l’exécuterais. Je suis, et je demeurerais, même dans ma mort un shinobi, un shinobi de Kumo. Il faut cependant lire en sous texte, Kumo libre, veut surtout dire Kumo libéré de son Raikage et qu’en outre, je suis désormais tant un shinobi de Kumo, qu’un soldat de l’empire. Mon sang vient de Hi après tout.
Je me demandais comment la régente allait prendre mes paroles, mais si elle n’était pas en mesure de les prendre ainsi, cela signifierait que j’avais fait fausse route, et que j’en paierai peut-être de ma vie, mais j’étais prêt à l’assumer.
— J’ai vraisemblablement réussi à les convaincre. Elle m’a indiqué que je serais recontacté ensuite pour réaliser une mission pour eux, sans doute en vue de prouver ma bonne foi. Quoi qu’il en soit, je suis sous votre commandement, et c’est surtout à vous que je souhaite présenter ma bonne foi. Dès lors, si je peux faire quoi que ce soit pour cela, vous n’avez qu’à dire un mot. Peut-être est-ce présomptueux de ma part, mais si je puis me permettre, j’aimerais vous présenter mon plan pour la suite. À voir bien sûr, ce que vous souhaitez en faire.
Je me raclais la gorge. Je n’avais plus l’habitude d’user autant de salive.
— Je propose de vous faire part de rapport hebdomadaire ici même, ou ailleurs comme cela vous arrange, peut-être en des lieux différents par sécurité, par courrier scellé et crypté qui ne puisse être compris que par vous et moi, dis-je en présentant une capsule que je l’invitais à saisir.
Cette simple capsule, elle-même scellé, comprenait un parchemin avec le système de codage et de décodage pour nos potentielles conversations futur.
— Cela étant j’ai bien conscience que ce n’est pas une faveur très facile à accorder — et c’est pour cela que je suis prêt à exécuter toute contrepartie que vous souhaiteriez — mais pour la mission qu’ils vont me donner pour faire mes preuves, il me faudra de quoi assurer, et donc avoir les mains plus ou moins libres... À vous de voir ce que vous en pensez…
Les deux rubis qui brillaient dans la pénombre devinrent plus sombres, s'enfoncèrent encore plus dans un recoin tamisé pour se vêtir de la nappe d'ombre qui y régnait. Disparaître au profit d'un terrain neutre, vague ; laisser le shinobi en tête à tête avec lui même, ses propres confidences, ses révélations. Il avait été assez malin pour décrypter les tracts de la menace qui rampait à vos pieds ; Et ça avait payé. Le simple fait qu'il puisse rencontrer une des identités clefs des forces opposées montrait que l'ennemi n'était peut-être pas si organisé que ça. Bien que leurs ambitions soient claires ; ils manquaient de membres, d'où les tracts. Cette idée confirmée te rassurait sur un seul plan : La résistance n'était pas encore complète, ni structurée. Il leur faudrait des semaines, voire des mois pour devenir dangereuse. Pour le moment, ils étaient assez grossiers dans leurs actions : recruter de vive voix de nouveaux membres était une lettre ouverte quant à leur existence. La résistance était donc actée ; vivante, mais ne se cachait pas.
Il t'était donc possible de les suivre de loin ; ils laissaient des traces, discrètes mais encore perceptibles. Et un atout potentiel venait de se présenter de lui même ; Les dires du ninja paraissaient sincères, il avait même été jusqu'à avouer sa fidélité à un Kumo libre, en jouant sur toute la flexibilité du terme. Libre, mais libre de quoi, de qui ? Ta prédécesseure, une Metaru, semblait avoir ses forces et ses faiblesses ; ses fidèles et ses anti. Ce qui t'ouvrait une porte facile : rebondir sur des défauts d'excès de de brimades. Si le Nara jouait son rôle avec tactique, alors tu aurais une main de l'ombre qui empoignerait les décisions du groupuscule.
- Jamais au même endroit, jamais au même moment, jamais le même visage
Un ton sérieux, presque rude. Parce que ce soldat devait comprendre toute l'importance de sa mission, de son nouveau rôle. Agent double dans une querelle non ouverte : il serait constamment en danger, mais s'il se proposait de lui même, c'est qu'il en avait conscience.
- S'ils décident de faire appel à toi ; alors tu ne seras plus jamais en sécurité ; ils te suivront probablement, traqueront chacun de tes faits et gestes. N'en fait pas trop, n'en dit pas trop ; même si tes actes doivent aller à l'encontre de notre Empire ; fait le. Tu dois gagner leur confiance et avoir accès à leur cœur décisif... Ainsi, seulement ainsi, nous pourrons anticiper leurs mouvements, et prévenir... plutôt que guérir.
Sur la fin de tes paroles, tes pas t'avaient rapprochée de lui ; sortant de l'obscurité ; révélant un visage infiniment figé entre l'enfance et l’adulescence. Une enfant par les traits ; une antiquité par l'émotion.
- Bon courage, soldat.
Ton corps s’éclipse en une nuée vaporeuse. L'entretien ne devait pas durer plus longtemps ; chaque seconde était trop dangereuse pour que votre discussion perdure.
Nara Shikarin... A lui de prouver sa valeur désormais.
Spoiler:
Rendez-vous au cimetière dans le dernier mausolée ] H. Rie [